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Démarchage bancaire et financier : quelques clarifications

17/06/2013


Au-delà des nombreux débats que peut susciter le projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires (le « Projet ») en ce qu’il prévoit d’interdire aux établissements de crédit d’effectuer des opérations de négociation pour compte propre(1), ce texte présente l’intérêt de vouloir clarifier la situation de l’émission de courrier aux clients ou prospects au regard de la réglementation sur le démarchage bancaire et financier (le « Démarchage »).

En effet, le Projet envisage l’ajout d’une nouvelle dérogation au Démarchage, à savoir la « diffusion auprès des personnes physiques ou morales d'une simple information publicitaire, à l'exclusion de tout document contractuel ou précontractuel, quel que soit le support ».

La justification d’une telle évolution serait que la diffusion de ces informations n’aurait pas pour objet de recueillir l’accord d’un client sur une opération donnée mais bien d’informer le public sur divers biens et services.

Pour autant, la définition même du Démarchage couvre les prises de contacts non sollicitées (ou sollicitées en cas de présentation physique) auprès de personnes déterminées en vue de la réalisation d’opérations de nature bancaire ou financière(2). A cet égard, la doctrine s’accorde à distinguer les documents constitutifs d’un acte de Démarchage de ce qui ne l’était pas.

Cette distinction se base sur l’exégèse des termes « personne déterminée » et « en vue » de la définition sur le démarchage : la caractérisation d’un document comme vecteur d’un acte de Démarchage se fonde sur le fait que le document est ou non personnalisé et/ou qu’il apparaît comme propre à « conduire » à l’établissement d’une relation contractuelle (coupon réponse, etc.). Toutefois, ces critères étant selon les auteurs, alternatifs ou cumulatifs, l’incertitude juridique demeure.

A ce titre, la modification introduite par le Projet ne peut que satisfaire puisqu’elle tente de préciser par la négative ce que recouvre le Démarchage et par là, reconnaît une pratique bien établie (tout comme l’introduction d’une nouvelle exemption au même texte en 2007, s’agissant des chaînes de distribution par des prestataires agréés, avait permis d’éviter l’invalidation de certains schémas de distribution(3).

Ceci dit, deux critiques peuvent être formulées :

  • Tout d’abord, la distinction entre documents publicitaires et documents précontractuels peut susciter des débats. Ainsi, les moyens de qualification des connaissances des clients s’étant renforcés, il est possible d’adresser des documents relativement précis à un client concernant une opération en particulier (dont on peut raisonnablement penser qu’elle l’intéressera) sous la forme de document publicitaire. Quel devrait-être le statut de ce type de document, si seuls les documents strictement précontractuels (le prospectus d’un OPCVM par exemple) sont constitutifs d’un acte de Démarchage ?
  • Ensuite, le corollaire de cette interrogation est, comme l’avaient relevé certains parlementaires, que « la pression encourage les banques et les conseillers en gestion de patrimoine à faire plus de documents publicitaires et moins de documents contractuels. Les particuliers vont donc recevoir des informations, des documents qui ne se disent pas publicitaires et qui le sont – une forme de Canada Dry, en quelque sorte »(4). Ces derniers avaient en conséquence proposé un amendement en vue de supprimer cette disposition.

La réponse à cette seconde critique se trouve dans le sort donné à cet amendement : il a été rejeté. C’est bien que nécessité fait loi.


1. Voir en ce sens l’article « De la critique du projet de loi de séparation des activités bancaires », Option Finance, 18 mars 2013.
2. Article L.341-1 du code monétaire et financier (le « CMF »).
3. Voir l’article L.341-2-9° du CMF.
4. Amendement n°125.

Analyse juridique parue dans la revue Option Finance du 17 juin 2013

Auteurs

Portrait deJérôme Sutour
Jérôme Sutour
Associé
Paris