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Incidences de l’annulation du PLU sur un projet de lotissement

Limites à la cristallisation des règles d’urbanisme du lotissement

11/12/2019

Dans un arrêt du 30 septembre 2019 (n°421889), le Conseil d’Etat a jugé que la règle du maintien pendant cinq ans des dispositions d’urbanisme en vigueur lors de l’obtention du permis d’aménager relatif à un lotissement et opposables aux autorisations d’urbanisme ultérieures ne s’applique pas en cas d’annulation du document d’urbanisme, laquelle fait renaître le document antérieur. Si cette décision a apporté une importante clarification, la loi ELAN est récemment venue préciser cette hypothèse.

Une annulation de PLU affectant un projet de lotissement

Dans cette affaire, un permis d'aménager un lotissement avait été accordé à une société. Une annulation du PLU par le juge administratif est intervenue ultérieurement. Elle a eu pour effet de faire renaître, en vertu de l’article L. 121-8 du Code de l'urbanisme (devenu l’article L. 600-12), le document d’urbanisme antérieurement applicable (POS).

Ce changement de règle n’était pas sans incidence, puisque le règlement du POS, contrairement au PLU annulé, classait les parcelles du projet de lotissement en zone non constructible.

Le lotisseur avait donc demandé au juge administratif de condamner la commune à lui verser une indemnité conséquente en réparation des préjudices qu’elle estimait avoir subis du fait de l’annulation juridictionnelle de son PLU. Cette demande a été à la fois rejetée en première instance (TA Pau, 16 décembre 2014, n°1201646) et en appel (CAA Bordeaux, 3 mai 2018, n°15BX00479).

Il revenait donc au Conseil d’Etat d’apprécier ce qui devait primer entre la cristallisation des règles d’urbanisme et les effets d’une annulation juridictionnelle d’un document d’urbanisme.

La cristallisation des règles d’urbanisme en matière de lotissement

L’article L. 442-14 du Code de l'urbanisme prévoit une garantie de stabilité des droits à construire, ou « cristallisation » des règles d’urbanisme, en vigueur au jour de la délivrance d’un permis d’aménager, pendant cinq ans à compter de l’achèvement des travaux (à compter de la date de non-opposition, pour une déclaration préalable). Cette cristallisation des règles d’urbanisme empêche que soient refusées des demandes de permis de construire sur le fondement de dispositions d’urbanisme intervenues postérieurement à l’autorisation du lotissement (permis d'aménager ou déclaration préalable). Ainsi, pendant ce délai, le lotisseur est en principe protégé d’éventuels changements de règles d’urbanisme applicables sur le terrain.

Un doute sur la portée de cette cristallisation en cas d’annulation du PLU

Il était certain que cette règle empêchait que soient opposées les règles issues d’une évolution du document d’urbanisme intervenue après l’autorisation du lotissement. Un doute persistait cependant quant à l’opposabilité des règles d’urbanisme remises en vigueur en cas de l’annulation dudit document. En effet, en application de l’article L .600-12 du Code de l’urbanisme, l’annulation d’un PLU a pour effet de faire renaître le document d’urbanisme immédiatement antérieur.

Ainsi, dans l’hypothèse où un PLU était annulé, les dispositions du document d’urbanisme immédiatement antérieur et remis en vigueur devaient-elles être considérées comme des dispositions d’urbanisme intervenues postérieurement à l’autorisation du lotissement, non opposables aux futures autorisations d’urbanisme ? Sur cette question, les décisions jurisprudentielles et positions doctrinales divergeaient.

Opposabilité aux autorisations d’urbanisme des règles remises en vigueur par annulation du PLU

Par la décision du 30 septembre dernier, la Haute juridiction a mis fin à ces incertitudes. Elle considère que, si la cristallisation des règles d’urbanisme prévue par l’article L. 442-14 du Code l’urbanisme fait obstacle à ce que, dans le délai de cinq ans à compter de l’achèvement d’un lotissement, des dispositions d’urbanisme adoptées après l’autorisation du lotissement puissent fonder un refus de permis de construire au sein de ce lotissement, cet article n’a « en revanche, pas pour effet de faire obstacle à un refus fondé sur des dispositions d’urbanisme antérieures remises en vigueur […] à la suite d’une annulation contentieuse intervenue postérieurement à l’autorisation du lotissement. ».

Les dispositions d’urbanisme remises en vigueur du fait de l’annulation du document d’urbanisme sont donc opposables aux autorisations d’urbanisme, quand bien même cette annulation interviendrait dans le délai de cinq ans, faisant ainsi échec à la cristallisation des règles d’urbanisme.

Les conséquences de l’annulation d’un document d’urbanisme priment donc sur la règle de la cristallisation. Pour ce contentieux indemnitaire, le Conseil d’Etat a donc renvoyé l’affaire devant la cour administrative d’appel de Bordeaux.

Incidence limitée de la primauté du document d’urbanisme remis en vigueur par l’annulation du PLU

Si cette décision a une vertu de clarification, sa portée demeure limitée dans la mesure où la loi ELAN a modifié l’article L. 442-14 du Code de l’urbanisme.

Ce texte précise désormais que l’annulation d’un PLU « pour un motif étranger aux règles d’urbanisme applicables au lotissement » n’empêche pas le maintien des règles en vigueur à la date de la délivrance du permis d’aménager ou de la décision de non-opposition à déclaration préalable, excluant ainsi l’effet de l’annulation automatique du PLU. En revanche, si l’annulation provient d’une illégalité des règles applicables au lotissement, le document d’urbanisme antérieur remis en vigueur s’appliquera aux demandes de permis de construire et déclarations préalables.

Avec pragmatisme, ce mécanisme empêche de faire supporter aux lotisseurs les éventuels effets des annulations d’un document d’urbanisme « extérieures » à leur projet.


Actualité du droit immobilier & construction

Cet article a été publié dans notre Lettre Promotion-Urbanisme de décembre 2019. Cliquez ci-dessous pour découvrir les autres articles de cette lettre.


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