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Investissement locatif non professionnel dans les résidences meublées : l’administration applique la loi avec une certaine largeur de vues

02/04/2010

Le statut de loueur en meublé professionnel est devenu quasi-inaccessible. Celui de loueur non professionnel, au départ modérément séduisant, a progressivement pris du lustre, notamment en raison de certaines ouvertures faites par l’administration. Point de la situation.


1. L’arbitrage de la loi en faveur des loueurs en meublé non professionnels au détriment des loueurs professionnels

La loi de finances rectificative pour 2009 a durci les conditions d’application du régime du loueur en meublé professionnel, désormais réservé au nombre limité de contribuables qui retirent de cette activité au moins 23 000 euros de recettes annuelles et dont les autres revenus professionnels, appréciés à l’échelon du foyer, restent inférieurs au montant desdites recettes.

En contrepartie, pour les loueurs en meublé non professionnels, la même loi a créé une réduction d’impôt sur le revenu applicable à compter du 1er janvier 2009 au titre des investissements opérés dans certaines résidences meublées : établissements d’accueil des personnes âgées ou adultes handicapés, établissements délivrant des soins de longue durée, structures affectées à l’accueil familial salarié de personnes âgées ou handicapées, résidences avec services pour étudiants, résidences de tourisme classées. La localisation de la résidence est indifférente. Les contribuables doivent destiner le logement (1) à une location meublée consentie pendant au moins neuf ans à l’exploitant de l’établissement ou de la résidence dont dépend le logement.

La réduction d’impôt avait été originairement fixée à 5% du prix de revient du logement et son montant limité à 25 000 euros (ce qui correspond à un logement de 500 000 euros maximum). Aucune possibilité de report n’était prévue lorsque la fraction de la réduction d’impôt excède l’impôt dû au titre d’une année.

La deuxième loi de finances rectificative pour 2009 du 20 avril 2009 a étendu le dispositif aux résidences avec services pour personnes âgées ou handicapées ayant obtenu l’agrément « qualité » visé à l’article L 7232-3 du Code du travail et a renforcé assez significativement la réduction d’impôt en l’alignant sur celle retenue par le « dispositif Scellier » (2). Ainsi, la réduction d’impôt est désormais calculée sur le prix de revient des logements, retenu dans la limite de 300 000 euros, au taux de 25 % pour les logements acquis en 2009 et 2010 et au taux de 20 % pour les logements acquis en 2011 et 2012. L’obtention de la réduction d’impôt s’échelonne par neuvièmes sur une période de neuf ans et la loi a mis en place un mécanisme de report sur six ans de la fraction de la réduction d’impôt non imputée sur l’impôt dû au titre d’une année.

Si ces aménagements ont constitué une réelle avancée du régime, le texte de loi a laissé de nombreuses « zones d’ombre », qui auraient pu freiner significativement l’attrait des investisseurs pour ce nouveau régime.

2. L’interprétation favorable donnée par l’administration du régime de réduction d’impôt

L’instruction administrative du 29 décembre 2009 (n° 5 B-2-10 ; BOI du 13 janvier 2010) lève la plupart des incertitudes que comportait la loi et retient de celle-ci une interprétation bienveillante.

2-1 Investisseurs migrants

Le transfert hors de France du domicile fiscal du contribuable pendant la période d’engagement de location des neuf ans n’entraîne pas la remise en cause de l’avantage fiscal obtenu et ne fait que provoquer la perte (définitive) des réductions venant à échéance pendant la période de domiciliation à l’étranger. Si le contribuable rétablit son domicile en France avant l’expiration de la période des neuf ans, il bénéficiera donc à nouveau de la réduction d’impôt à hauteur d’un neuvième de son montant, mais seulement pour la durée restant à courir jusqu’à la fin de cette période.

2-2 Changement de statut fiscal

L’Administration fiscale précise que la qualité de loueur en meublé non professionnel du contribuable s’apprécie au moment de l’acquisition du logement. Ainsi, si l’intéressé perd sa qualité de loueur en meublé non professionnel pour devenir loueur en meublé professionnel au cours de la période d’engagement de la location, la réduction d’impôt n’est pas remise en cause.

2-3 Occupation de la résidence de tourisme par l’investisseur

Visant spécifiquement les investissements dans les résidences de tourisme et ce cas seulement, l’Administration admet dans son instruction définitive (le projet soumis à la consultation ne comportait pas cette solution) que le logement peut valablement être occupé par son propriétaire, sans remise en cause de l’avantage fiscal. Le propriétaire doit alors régler à l’exploitant de la résidence le prix normal de son séjour, qui doit représenter au moins 75 % du prix public (compte tenu du fait que l’exploitant n’engage aucun frais de commercialisation sur la location concernée).

Lorsque le règlement du prix du séjour s’effectue par compensation avec les loyers que l’exploitant doit au propriétaire au titre de la location de son logement, l’administration soumet le bénéfice de la réduction d’impôt à deux conditions : la durée totale des périodes d’occupation du logement par son propriétaire ne doit pas excéder huit semaines par an et le revenu déclaré par le propriétaire doit correspondre au loyer annuel qui aurait été normalement dû par l’exploitant en l’absence de toute occupation par le propriétaire. Ainsi, la réduction de 25 % dont bénéficie le propriétaire sur le prix de ses périodes d’occupation ne doit en aucun cas entraîner une minoration du revenu qu’il est tenu de déclarer.

2-4 Changement d’exploitant

Il est de principe qu’en cas de changement d’exploitant au cours de la période d’engagement de location, le logement doit être loué au nouvel exploitant dans un délai d’un mois, faute de quoi la réduction d’impôt est reprise. Il est toutefois admis que la période de vacance du logement peut, dans certains cas de défaillance de l’exploitant strictement définis (liquidation judiciaire de l’exploitant, résiliation du bail commercial par l’exploitant et mise en œuvre par les investisseurs de la clause de résiliation unilatérale), être supérieure à un mois à condition de ne pas excéder douze mois.

Ce faisant, l’Administration prend en considération les difficultés rencontrées ces dernières années par certains investisseurs qui ont souffert de la défaillance d’un certain nombre d’exploitants de résidences de tourisme.

2-5 Résidences avec services pour étudiants

A propos des résidences avec services pour étudiants, l’Administration indique que ces résidences doivent être occupées par au moins 70 % d’étudiants, cette proportion étant toutefois appréciée sur une période de référence de trois mois s’étendant chaque année du 1er octobre au 31 décembre.

Ce faisant, l’Administration admet implicitement que les résidences soient le reste du temps occupées par d’autres résidents que les étudiants, en particulier pendant les vacances scolaires d’été.

A noter que ces résidences doivent fournir au moins trois des prestations suivantes : petit déjeuner, nettoyage régulier des locaux, fourniture de linge de maison et réception, même non personnalisée, de la clientèle.

3. Solutions favorables aux promoteurs et exploitants

L’Administration fiscale fait preuve de compréhension à l’égard des sociétés du secteur immobilier (sociétés de construction-vente, promoteurs immobiliers, exploitants de résidence …) qui ont souffert du ralentissement économique en 2009.

Ainsi, elle accepte de considérer comme étant encore neufs, pour l’application de la réduction d’impôt, les logements mis en location par les sociétés de construction-vente au cours des années 2009 et 2010, dès lors que leur acquisition intervient avant l’expiration du douzième mois suivant celui au titre duquel le bail a été conclu.

De la même façon, s’agissant des logements achevés depuis plus de 15 ans ayant fait l’objet d’une réhabilitation, l’Administration admet que le logement aura pu être loué ou utilisé par le vendeur entre la date d’achèvement des travaux de réhabilitation et celle de son acquisition par le contribuable qui entend bénéficier de la réduction d’impôt, dès lors que cette période de location n’aura pas excédé douze mois.

Enfin, l’Administration offre aux sociétés du secteur immobilier de nouveaux débouchés en admettant que l’acquisition à titre onéreux de logements issus de la transformation d’un local affecté à un usage autre que l’habitation qui entre dans le champ d’application de la TVA immobilière en application de l’article 257, 7° du CGI ouvre droit à l’avantage fiscal. Le local transformé est donc assimilé à un logement neuf pour l’application du régime.

Gageons que ce régime fiscal, commenté de façon libérale par l’administration, saura trouver un écho favorable auprès des contribuables !

Attention toutefois à ne pas perdre de vue que ce régime fiscal avantageux est soumis, comme tant d’autres désormais, au « plafonnement global des niches fiscales » égal en 2009 à 25 000 euros plus 10% du revenu imposable du foyer fiscal. Ce plafonnement a été abaissé par la loi de finances pour 2010 à 20 000 euros plus 8 % du revenu imposable. Ce nouveau plafond ne concerne pas toutefois les investissements locatifs non professionnels dans des résidences meublées pour lesquels une promesse d’achat ou une promesse synallagmatique a été souscrite par l’acquéreur avant le 1er janvier 2010.


(1) Sont concernés les logements acquis neufs ou en VEFA, ainsi que les logements achevés depuis au moins 15 ans ayant fait ou faisant l’objet d’une réhabilitation ou d’une rénovation.

(2) Depuis le 1er janvier 2009, les contribuables qui acquièrent un logement neuf bénéficient d’une réduction d’impôt à condition qu’ils s’engagent à le louer nu pendant au moins 9 ans à un niveau de loyer ne dépassant pas certains plafonds.


Elodis Dellis, avocat

Article paru dans la revue Option Finance le 22 février 2010