La qualité de professionnel de l’acheteur ne dispense pas le vendeur d’un produit nouveau de lui fournir toutes les informations nécessaires à son usage et l’informer des risques qu’il présente. Ce rappel de la Cour de cassation est l’occasion de faire un point sur la portée de l’obligation d’information du fabricant (Cass. com. 27 nov. 2019 n°18-16.821).
En l’espèce, un arboriculteur achète un produit phytosanitaire destiné à protéger les fruits de ses abricotiers. Une fois traités, les fruits deviennent impropres à la consommation. L’arboriculteur, acheteur professionnel, assigne son vendeur en paiement de dommages-intérêts. Ce dernier appelle alors en garantie le fabricant du produit en se prévalant d’un manquement de celui-ci à son obligation d’information et de conseil.
La Cour de cassation approuve la condamnation du fabricant au motif que, s’il avait effectivement donné certains conseils et recommandations, il n’avait pas fourni d’indications sur la mise en œuvre de la méthode d’application du produit ni précisé que les particularités de l’épiderme de l’abricot étaient de nature à davantage retenir le produit qu’un fruit lisse et n’avait pas alerté sur les conséquences irrémédiables dans le cas d’une mauvaise utilisation du produit. En l’espèce, les fruits ne pouvant être nettoyés, ils étaient devenus impropres à la consommation.
La Cour de cassation retient ainsi le manquement du fabricant à son « obligation de donner à l’acquéreur d’un produit nouveau, fût-il utilisateur professionnel, les renseignements nécessaires à son usage et de l’informer, le cas échéant, des risques pouvant en résulter ».
Une obligation d’information étendue qui pèse sur tout fabricant et vendeur
Cette obligation qui pèse sur tout vendeur comme sur tout fabricant trouve essentiellement son fondement dans le droit de la vente (article 1615 du Code civil relatif à l’obligation de délivrance) mais aussi dans le droit commun des contrats (article 1112-1 du Code civil concernant l’obligation générale d’information précontractuelle).
La jurisprudence impose au vendeur et au fabricant d’informer l’acheteur sur les caractéristiques de la chose, qu’elles soient matérielles ou juridiques, ses contraintes techniques, ses contre-indications et ses limites ou encore sur ses éventuels risques notamment lorsqu’il s’agit d’un produit dangereux. Le vendeur doit notamment se renseigner sur les besoins de l’acheteur afin d’être en mesure de l’informer quant à l’adéquation ou non à l’utilisation qui en est prévue (Civ. 1re 28 oct. 2010 n°09-16.913). A défaut il engage sa responsabilité.
Une obligation d’information fonction de la compétence de l’acheteur
Il est ainsi de jurisprudence constante que l’obligation d’information et de conseil du fabricant à l’égard de l’acheteur professionnel n’existe que dans la mesure où la compétence de celui-ci ne lui donne pas les moyens d’apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques des produits (Civ. 1re, 30 nov. 2004 n°01-14314). Cette compétence est laissée à l’appréciation souveraine des juges du fond.
Lorsqu’il s’agit d’un produit nouveau, l’acheteur n’a pas encore toutes les connaissances nécessaires bien qu’il soit professionnel. C’est pourquoi les juges retiennent dans ce cas l’obligation, pour le vendeur ou le fabricant, de donner à l’acquéreur les renseignements nécessaires à son exploitation (voir aussi Civ. 3e, 18 fév. 2004 n°02-17523).
En l’espèce, il a été jugé que l’arboriculteur qui avait interrogé le fabricant sur les caractéristiques techniques de ce nouveau produit, initialement mis sur le marché pour le traitement des pommes puis des abricots, restait légitimement créancier d’une obligation d’information étendue.
Une obligation d’information qui a pour limite la propre obligation de se renseigner de l’acheteur
En effet, le partage de responsabilité est retenu si l’acheteur n’adopte pas un comportement diligent quant à sa propre obligation de s’enquérir et prendre connaissance des informations à sa disposition.
Ainsi, il a été jugé que l’acheteur ayant employé un produit nouveau sans s’inquiéter de la communication de sa fiche technique avait manifesté une légèreté répréhensible et devait être considéré comme ayant participé à la survenance du dommage (Cass. com. 21 sept. 2010 n° 09-14484).
Article paru dans le magazine Option Finance du 10/04/2020.
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Cet article a été publié dans notre Lettre des affaires commerciales de Juin 2020. Cliquez ci-dessous pour découvrir les autres articles de cette lettre.
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