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Modernisation du système de TVA : libéralisation des taux et optimisation du régime des petites entreprises

22/01/2018

La Commission européenne publie les projets détaillés de réforme pour les deux derniers volets de son plan d’action pour l’avenir de la TVA.

Depuis le lancement en avril 2016 de son plan d’action pour moderniser et consolider le système commun de la TVA, la Commission européenne a d’ores et déjà obtenu l’adoption par le Conseil de l’Union d’une profonde et indispensable réforme des règles applicables au commerce en ligne (Directive 2017/2455/UE du 5 décembre 2017 dont l’entrée en application interviendra pour l’essentiel le 1er janvier 2021).

Elle a également publié ses projets de textes destinés à ouvrir la voie d’un régime définitif pour les opérations transfrontalières et devrait prochainement les compléter par la présentation des modalités techniques du fonctionnement de ce régime définitif dont les détails pourraient conditionner l’adhésion des Etats comme des opérateurs à ce projet.

Font également partie des projets en cours des mesures de renforcement de la coopération entre les Etats membres pour lutter contre la fraude et un projet de directive qui offrirait aux Etats membres, dans l’attente du nouveau régime définitif, la possibilité de recourir à l’autoliquidation généralisée pour mieux lutter contre la fraude.

Les documents publiés le 18 janvier 2018 dévoilent le détail des deux derniers volets du plan d’action.

1) Réforme de l’encadrement des taux

Actuellement, la directive TVA autorise l’application dans chaque Etat membre d’un taux normal de la taxe qui doit être au moins égal à 15 % et deux taux réduits qui ne peuvent être inférieurs à 5 %. Les Etats membres ne sont autorisés à faire application d’un taux réduit de la taxe qu’aux livraisons de biens et prestations de services relevant de l’une des catégories énumérées à l’annexe III de la directive.

Par dérogation à ces règles générales et dans l’attente de l’adoption d’un régime définitif qui n’est jamais venu, les Etats membres continuent d’appliquer des taux particuliers qui ne répondent pas aux critères rappelés ci-dessus. Selon la Commission, 250 taux dérogatoires seraient actuellement appliqués dans les Etats membres de l’UE.

Puisque les principes de fonctionnement du système de la TVA devraient à l’avenir être fondés sur un principe d’imposition au lieu de destination, la Commission, confortée par plusieurs études menées sur cette question, estime possible de laisser aux Etats membres une plus grande liberté pour la fixation des taux sans risque de voir le fonctionnement du marché unique perturbé par les écarts de taux pratiqués dans les différents Etats membres.

Suivant cette analyse, le projet de directive permettrait aux Etats membres d’appliquer les taux de leur choix aux biens et services imposables sur le territoire dans la limite de l’encadrement suivant :

  • en plus d’un taux normal au moins égal à 15 % et des deux taux réduits au moins égaux à 5 % dont ils disposent actuellement, les Etats membres pourraient appliquer un taux compris entre 0 et 5 % et un taux 0 (les opérations bénéficiant du taux 0 ne sont pas soumises à la TVA mais ouvrant néanmoins droit à la déduction de la taxe qui grève le coût de leur production pour les opérateurs qui les commercialisent) ;
  • chaque Etat membre devrait veiller à ce que la combinaison des différents taux aboutisse à un taux moyen pondéré d’imposition supérieur à 12 % ;
  • l’application d’un taux réduit serait interdite dans tous les Etats membres pour les biens et services limitativement énumérés par la directive. Parmi les biens et services figurant actuellement dans le projet figurent notamment les opérations relatives aux moyens de transport, les opérations bancaires et d’assurance, les jeux de hasard et d’argent, les livraisons de boissons alcooliques, de meubles, d’équipements électriques, de produits informatiques, de métaux précieux, les prestations des agences de voyages, les biens d’occasion soumis au régime de la marge…

Corrélativement, tous les taux particuliers appliqués jusqu’à présent par les différents Etats membres seraient supprimés à l’exception, pour le Portugal, des taux spécifiques aux régions autonomes des Açores et Madère.

Par rapport à l’existant, la France pourrait conserver l’actuel taux de 2,1 % ainsi que les taux spécifiques appliqués dans les départements et territoires d’outre-mer où la directive ne s'applique pas mais devrait mettre un terme aux taux particuliers à la Corse. Elle gagnerait la possibilité de recourir un taux 0 qui n’est actuellement pas appliqué.

Bien entendu, la liberté de fixation des taux demeurera en tout état de cause contrainte pas les principes du traité de l’Union (en particulier ceux relatifs aux aides d’Etat, aux impositions protectionnistes et au principe de libre concurrence) et ceux de fonctionnement de la directive, en particulier le principe de neutralité suivant lequel des produits similaires ne peuvent faire l’objet d’un traitement différent.

Selon le projet publié, cette réforme entrerait en vigueur au même moment que celle proposée pour le régime définitif des opérations transfrontalières que la Commission propose de fixer au 1er janvier 2022.

La Commission ne donne pas d’indication sur l’articulation entre ce projet et celui par lequel elle proposait de permettre dès à présent l’application d’un taux réduit à la presse en ligne qui n’a pas encore recueilli un vote à l’unanimité des Etats membres nécessaire pour l’adoption par l’Union européenne des réformes en matière fiscale.

2) Consolidation du régime des petites entreprises

L’amélioration du régime des petites entreprises constitue un élément clé du renforcement du marché intérieur et des conditions de la concurrence.

En plus des quelques mesures déjà incluses dans les autres projets proposés par la Commission (dont la franchise pour les startups incluse dans la réforme adoptée pour le commerce en ligne), la Commission propose une série de mesures ayant pour objectif d’assurer, dans les Etats membres qui appliquent un régime de franchise, l’égalité de traitement des petites entreprises qui y réalisent des opérations, qu’elles y soient ou non établies.

Les Etats membres conserveraient une autonomie pour la fixation du seuil d’application de la franchise qui ne pourrait toutefois excéder 85 000 euros. Ils seraient en outre tenus de faire bénéficier les opérateurs non établis sur leur territoire de la franchise à la condition que le chiffre d’affaires total réalisé par l’entreprise dans l’UE n’excède pas 100 000 euros.

Les Etats membres seraient par ailleurs incités à proposer aux petites entreprises, qu’elles relèvent ou non du régime de la franchise, des obligations simplifiées.

L’entrée en application de ce volet de la réforme serait fixée au 1er juillet 2022.

  • Proposition de directive modifiant la Dir. 2006/112/CE en ce qui concerne les taux de TVA (COM(2018) 20, 18 janvier 2018).
  • Proposition de directive modifiant la Dir. 2006/112/CE relative au système commun de TVA en ce qui concerne le régime particulier des petites entreprises (COM(2018).21, 18 janv. 2018).