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Permis de construire tacite et déféré préfectoral

Lettre construction-urbanisme | Mars 2019

25/03/2019

CE, 22 octobre 2018, n° 400779

En l’espèce, un pétitionnaire avait déposé une demande de permis de construire qui avait été transmise par la commune au préfet conformément à l’article R.423-7 du Code de l’urbanisme. A la suite d’une demande de la commune, le pétitionnaire lui avait adressé des pièces complémentaires ; celle-ci n’avait alors pas procédé à la transmission de ces éléments au préfet.

Le pétitionnaire, en l’absence de réponse de l’Administration à l’expiration du délai d’instruction, est devenu titulaire d’un permis tacite. Le maire de la commune a quant à lui pris, quelques jours après - en conséquence, hors délai - un arrêté refusant de délivrer le permis de construire.

Informé par le maire de l’existence du permis tacite, le préfet a saisi le juge administratif d’un déféré aux fins d’annulation de ce permis. Le Tribunal administratif comme la Cour d’appel administrative ont accueilli cette demande. Le pétitionnaire s’est alors pourvu en cassation en soulevant notamment l’irrecevabilité du déféré préfectoral, ce dernier ayant eu lieu plus de deux mois après la date d’acquisition du permis tacite.

Le Conseil d’Etat rejette le pourvoi.

Dans un premier temps, il rappelle notamment :

  • les termes de l’article L.2131-6 du Code général des collectivités territoriales définissant le cadre du déféré préfectoral,
  • qu’à défaut de décision expresse quant à une demande de permis de construire avant l’expiration du délai d’instruction, le silence de l’autorité compétente vaut permis de construire, ce dernier étant exécutoire à compter de la date à laquelle il est acquis sans qu’il y ait lieu de rechercher s’il a été transmis au préfet, et
  • que le caractère exécutoire du permis tacite ne le soustrait pas pour autant à un éventuel déféré préfectoral.

Le Conseil d’Etat confirme ensuite le principe posé par son arrêt du 17 décembre 2014 (n°373681) : "Le délai du déféré court alors à compter de la date à laquelle le permis est acquis ou, dans l'hypothèse où la commune ne satisfait à l'obligation de transmission que postérieurement à cette date, à compter de la date de cette transmission", solution trouvant son explication dans le fait qu’un permis tacite, dans la mesure où il naît du silence gardé par l’autorité chargé de sa délivrance, ne peut être physiquement transmis.

Enfin, il définit plus précisément la notion d’"entier dossier" en considérant qu‘elle couvre tant le dossier de demande initial que les pièces reçues à la suite d’une demande complémentaire de la commune. Il en découle qu'en l’absence de transmission desdites pièces, le délai du déféré préfectoral ne court pas. Or, telles étaient bien les circonstances de l’espèce.

Le Conseil d’Etat ajoute en outre qu’est indifférent le fait que les pièces manquantes soient ou non nécessaires à l’exercice du contrôle de légalité ou que le préfet ait pu les demander de sa propre initiative : "ces circonstances sont sans incidence sur l’obligation pesant sur la commune de transmettre au préfet l’entier dossier de demande".

Si la position du Conseil d’Etat peut se justifier quant à la nécessité pour le préfet de pouvoir assurer le contrôle de la légalité d’une autorisation qui n’a, en tant que telle, aucune existence physique, elle laisse néanmoins un sentiment d’iniquité et d’insécurité juridique du point de vue du pétitionnaire. Ce dernier voit ainsi la négligence de la commune saluée alors que lui-même se retrouve en définitive sanctionné pour des manquements qui ne sont pas les siens et sur lesquels il ne peut pas agir.

Cette position mériterait donc d’être à l’avenir plus nuancée, à tout le moins en présence de la sollicitation d’informations complémentaires de caractère mineur ou dans les hypothèses où, eu égard aux circonstances, le préfet aurait été en mesure de déduire de manière suffisamment certaine la date de naissance du permis tacite.  


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Cet article a été publié dans notre Lettre construction-urbanisme de mars 2019. Cliquez ci-dessous pour découvrir les autres articles de cette lettre.

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Droit immobilier & construction

Lettre Construction-Urbanisme | Décembre 2018

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Christelle Labadie
Professional Support Lawyer - Droit immobilier
Paris