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Quelle qualification pour les créations salariées ?

02/06/2014

Deux récentes décisions rendues par la Cour de cassation le 19 décembre 2013 et par la cour d’appel de Paris le 22 mars 2013 abordent la délicate question de la qualification des créations salariées(1).

Les deux litiges opposaient des employeurs à leurs anciens salariés, exerçant dans l'affaire Van Cleef les fonctions de dessinateur de bijoux, et dans l'affaire Lalique les fonctions de directeur artistique.

A la suite de leurs licenciements, les anciens salariés revendiquaient un droit d’ueur sur des créations réalisées en exécution de leur contrat de travail.

Les sociétés Van Cleef et Lalique fondaient toutes deux leur défense sur l'aticle L. 113-5 alinéa 1er du code de la propriété intellectuelle selon lequel l’oeuvre collective est la propriété de la personne qui l'exploite sous son nom, laquelle se trouve investie des droits de l'auteur.

L’oeuvre collective est définie à l'article L. 113-2 alinéa 3 du code de la propriété intellectuelle comme« l'oeuvre créée sur l'initiative d'une personne physique ou morale qui l'édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l'ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun d'eux un droit distinct sur l'ensemble réalisé ».

Dans les deux affaires, la qualification d’oeuvre collective a été retenue par les juridictions saisies.

Dans l'affaire Van Cleef, la Cour de cassation a affirmé que la conception de bijoux « procédait d'un travail collectif associant de nombreuses personnes, que les sociétés avaient le pouvoir d'initiative sur la création et en contrôlaient le processus jusqu'au produit finalisé en fournissant à l'équipe des directives et des instructions esthétiques afin d'harmoniser les différentes contributions et que celles-ci se fondaient dans l'ensemble en vue duquel elles étaient conçues, sans qu'il soit possible d'attribuer à chaque intervenant un droit distinct sur les modèles réalisés ».

Dans l'affaire Lalique, la Cour a considéré que la salariée ne justifiait pas « qu’elle disposait d’ue réelle autonomie créatrice ainsi que d’une liberté dans les choix esthétiques lui permettant de conclure qu’elle est le seul titulaire de droits d’auteur sur ces oeuvres lesquelles refléteraient l'empreinte de sa seule personnalité ».

Ainsi, c'est l'absence d'autonomie du salarié dans la création qui permet de retenir la qualification d’oeuvre collective.


1 Cass. Civ.1, 19 décembre 2013, n° 12-26.409, Berthelot c/ Sté Van Cleef & Arpels et CA Paris, Pole 5, Chambre 2, 22 mars 2013, RG n° 11/19630, SA Lalique et Société Lalique Parfums c/Jean Dedouvre

Par Lucie Corvisier et Alexis Vichnievsky, avocats

L'actualité juridique en bref parue dans le magazine Option Finance le 19 mai 2014