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Déclaration de créances : quelques assouplissements bienvenus

02/08/2011


Une modification importante issue de la loi du 26 juillet 2005 a été la suppression de la règle de l'extinction des créances non déclarées à la « faillite » du débiteur. Les litiges relatifs à la régularité de cette déclaration auraient dû s'apaiser. Pourtant, il n'en a rien été.


C'est que les créances non déclarées « sont inopposables au débiteur pendant l'exécution du plan et après cette exécution lorsque les engagements énoncés dans le plan [. ..] ont été tenus ». En somme, l'exécution du plan de sauvegarde libère le débiteur du passif non déclaré ; ce qui profite aux personnes physiques garantes. Un enjeu important demeure donc pour savoir si la déclaration a été, ou non, régulièrement effectuée.

Or, plusieurs arrêts récents de la Cour de cassation invitent à une appréciation souple des conditions de la déclaration. Appréciation bénéfique aux créanciers, mais qui ne paraît pas porter une atteinte démesurée aux intérêts des débiteurs.

En premier lieu, il a été admis que peu importe la forme que prend la déclaration, dès lors qu'elle manifeste sans ambiguïté la volonté de réclamer dans la procédure collective le paiement de la créance. En l'occurrence, le créancier avait adressé au mandataire judiciaire trois certificats de non-paiement ainsi que la copie de trois chèques impayés. Certes n'y était jointe aucune lettre d'accompagnement, mais on ne pouvait se méprendre sur l'intention ainsi exprimée : dès lors que ces documents permettaient l'identification du créancier et la détermination du montant de la créance, il s'en déduit qu'il y a bien eu déclaration de créance (arrêt du 15 février 2011).

En second lieu, a pa être validée une déclaration faite à titre provisionnel, parce que, à nouveau, l'intention du créancier de déclarer à titre définitif n'était pas douteuse. Il faut rappeler que, contrairement à une pratique qui avait cours autrefois, la déclaration ne peut être faite à titre indicatif ou provisionnel. Puisqu'elle est analysée comme une demande en justice, la déclaration doit porter mention de la somme maximale, établie le cas échéant sur la base d'une évaluation, dont le créancier réclame paiement. Mais la frontière est mince entre la déclaration provisionnelle, qui ne vaut pas, et la déclaration estimative qui, elle, doit être admise.

En l'espèce, la Cour de cassation invite les juges du fond à examiner si, nonobstant les termes maladroits utilisés par le créancier —qui avait indiqué que sa créance était « éventuelle » et « provisionnelle », tout ce qu'il ne faut pas dire ! —la déclaration ne révélait pas la volonté non équivoque de réclamer à titre définitif la somme indiquée (arrêt du 30 novembre 2010). Au cas particulier, la créance n'était contestée ni dans son principe ni dans son montant.

Enfin, ont été pareillement allégées les règles gouvernant la déclaration par l'intermédiaire d'un mandataire. Puisque la déclaration de créance équivaut à une demande en justice, celui qui déclare la créance d'un tiers doit justifier, s'il n'est pas avocat, d'un pouvoir spécial donné par écrit. Mais jusqu'à quand cette justification peut-elle intervenir ? La question se pose singulièrement pour les prêts syndiqués, lorsque c'est le banquier chef de file qui procède à la déclaration de la créance globale impayée. En 2001, la Cour de cassation avait jugé que le pouvoir spécial devait être produit avant l'expiration du délai de déclaration ; ce qui, bien souvent, privait le créancier de la faculté d'apporter la preuve de l'existence du pouvoir. Désormais, si le tiers mandataire doit toujours, au moment de la déclaration, être muni d'un pouvoir spécial, la haute juridiction réunie en assemblée plénière admet que, en cas de contestation, il puisse en être justifié jusqu'au jour où le juge statue (arrêt du 4 février 2011).


Par Arnaud Reygrobellet,Of Counsel, professeur à l'université Paris X

Article paru dans la revue Option Finance du 27 juin 2011

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Arnaud Reygrobellet
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