Ces deux critères, rappelés par la Cour de cassation, sont :
- une clientèle personnelle distincte de celle d’un autre établissement plus vaste dans lequel le fonds est exploité (Cass. plen., 24 avril 1970, n° 68-10.914) ; et
- une autonomie de gestion (Cass. 3e civ., 24 janvier 1996, n° 94-10.322 ; Cass. 3e civ., 5 février 2003, n° 01-16.672) ou du moins l’absence de contraintes incompatibles avec un libre exercice de l’activité (Cass. 3e civ., 19 janvier 2005, n° 03-15.283 ; Cass. 3e civ., 23 juin 2016, n° 14-26.003).
L’affaire jugée – Elle opposait l’exploitant d’une activité de location de bateaux dans le bassin du jardin du Luxembourg et son successeur. Le premier avait informé la questure du Sénat de sa décision de vendre sa flotte de voiliers et de cesser de travailler en qualité de concessionnaire. Confirmant cette information, il avait ensuite certifié au questeur vendre « une concession constituée de 46 voiliers et d’une charrette de transport, un aval et l’autorisation du Sénat pour que le repreneur puisse travailler en exclusivité sur le jardin du Luxembourg ».
Le successeur, autorisé par arrêté à exploiter la location de bateaux pour une durée de cinq ans, a refusé de verser le prix demandé par l’exploitant initial. Ce dernier l’a alors assigné en régularisation et paiement de la vente d’un fonds de commerce, en faisant notamment valoir que les contraintes inhérentes à l’environnement pouvaient s’imposer à l’exploitant d’un fonds de commerce sans nécessairement remettre en cause son autonomie de gestion. L’exploitant initial mettait également en avant l’argument d’une clientèle propre du franchisé en raison des moyens mis en œuvre par lui. La Cour d’appel ne l’a pas suivi dans son argumentaire.
La solution de la Cour de cassation - La Cour de cassation a considéré que la Cour d’appel avait légalement justifiée sa décision en ayant relevé :
- l’absence d’une clientèle propre dès lors que, selon le règlement intérieur du jardin du Luxembourg, le premier exploitant ne pouvait exercer son activité que pendant les horaires d’ouverture du jardin et s’en trouvait privé en cas de fermeture, que ses clients ne constituaient donc pas une clientèle autonome indépendante de la situation de son exploitation ;
- le bénéfice de l’attractivité du site du jardin ;
- l’absence de preuve de fidélisation des clients ;
- l’absence d’autonomie de gestion puisque la questure du Sénat fixait le prix de location des bateaux.
La lecture du pourvoi enseigne qu’après avoir souligné qu’une activité commerciale sur le domaine public présentait toujours un caractère précaire, sans interdire pour autant l’existence d’un fonds de commerce, la Cour d’appel avait rappelé la nécessité d’avoir une clientèle propre pour prétendre détenir un fonds de commerce. Elle avait ainsi distingué la clientèle de l’achalandage induit par la situation des lieux. De même avait-elle pris soin de relever que la clientèle ne pouvait se caractériser par les moyens mis en œuvre par l’exploitant (les bateaux).
La décision de la Cour d’appel était aussi critiquée pour avoir jugé que le premier exploitant n’avait pas pu céder une concession, ni monnayer un droit de présentation d’un successeur au regard de l’article 9 du cahier des charges applicable aux autorisations diverses accordées dans le jardin du Luxembourg.
La Cour de cassation a également approuvé la Cour d’appel sur ce point dès lors que la seule lettre adressée par l’exploitant à la questure du Sénat faisait état de la vente de sa flotte de voiliers et non de la cession d’un fonds de commerce.
La portée de cette décision - Cette solution s’inscrit dans le droit fil d’une jurisprudence établie qui revêt une importance particulière pour apprécier le droit d’un commerçant à revendiquer le statut des baux commerciaux et qui repose sur une appréciation souveraine des juges du fond quant à l’existence d’une clientèle propre.
A lire également :
En savoir plus sur notre cabinet d'avocats :
Notre cabinet d'avocats est l’un des principaux cabinets d’avocats d’affaires internationaux. Notre enracinement local, notre positionnement unique et notre expertise reconnue nous permettent de fournir des solutions innovantes et à haute valeur ajoutée dans tous les domaines du droit.
Les cookies de réseaux sociaux collectent des données sur les informations que vous partagez à partir de notre site Internet par l’intermédiaire des outils des réseaux sociaux ou des données analytiques afin de comprendre votre parcours de navigation entre les outils des réseaux sociaux ou nos campagnes sur ceux-ci ou nos propres sites Internet. Nous les utilisons pour optimiser les différents canaux de communication afin de vous proposer notre contenu. Des informations détaillées concernant les outils que nous utilisons sont disponibles dans notre Politique de confidentialité.