La commande publique ne constitue certainement pas un des axes principaux de la loi PACTE. De nouvelles dispositions entérinent néanmoins deux dispositifs en la matière, en faveur des entreprises.
L’autorisation du recours à l’affacturage inversé
L’article 106 de la loi PACTE autorise les acheteurs (pouvoirs adjudicateurs et entités adjudicatrices au sens du Code de la commande publique - CCP) à recourir à l’affacturage inversé dans le cadre de leurs marchés publics. L’objectif est de permettre une réduction drastique des délais de paiement et leur impact en termes de trésorerie, notamment pour les PME/TPE.
En pratique, l’affacturage inversé conduira l’acheteur à proposer à son cocontractant de transmettre sa créance contractuelle à un établissement de crédit, désigné affactureur ou factor. Ce factor procèdera au paiement immédiat du fournisseur, à charge pour lui de recouvrer ensuite la créance auprès de l’acheteur.
L’intervention du factor s’effectue au moyen d’une cession de créance (article 1321 du Code civil, et sous la forme d’une cession Dailly visée aux articles L.313-23 et suivants du Code monétaire et financier) ou d’une subrogation conventionnelle (article 1246-1 du Code civil).
Pour les acheteurs dotés d’un comptable public, l’article 106 prévoit - pour éviter toute difficulté d’articulation avec les dispositions réglementaires de la comptabilité publique - que l’affacturage inversé ne fait pas obstacle à l’exercice de ses contrôles.
On rappellera enfin que le recours à l’affacturage inversé permet au fournisseur d’être payé plus vite, sans pour autant exonérer les acheteurs du respect des délais de paiement, sous peine de se voir appliquer des intérêts moratoires, une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement (article L.2192-12 CCP) voire pour certains une amende administrative (article L.2192-15 CCP).
Bien que le texte ne se prononce pas sur ce sujet, l’intervention du factor relèvera du champ d’application de la commande publique (à la différence de l’affacturage simple, dans lequel le factor intervient pour le compte du fournisseur). A cet égard, il est douteux que le marché d’affacturage inversé puisse relever de la définition des « services financiers liés à l'émission, à l'achat, à la vente ou au transfert de titres ou d'autres instruments financiers définis à l'article L.211-1 du Code monétaire et financier » ou des contrats d'emprunt exclus du Code de la commande publique par l'article L.2512-5 du CCP. Le choix du factor devrait donc s’effectuer dans le respect des dispositions de ce code.
En conclusion, nul doute que l’inscription dans la loi de l’affacturage inversé, déjà pratiqué par certains centres hospitaliers, a pour ambition de généraliser son utilisation par les acheteurs publics. Son usage devrait être également encouragé par une circulaire à paraître prochainement.
La restriction des ordres de service à zéro euro
L’article 195 de la loi PACTE crée un nouvel article L.2194-3 au sein du CCP, afin de restreindre l’utilisation par les acheteurs des ordres de service à zéro euro dans les marchés publics de travaux.
On connaît en effet la tendance de certains maîtres d’ouvrage publics à notifier des ordres de service imposant la réalisation de prestations supplémentaires ou modificatives, en considérant qu’elles seraient dépourvues d’incidence financière. Cette démarche est parfois utilisée de manière abusive, et dénoncée comme telle par les fédérations professionnelles.
Or, les entrepreneurs étant tenus de se conformer aux ordres de service qui leur sont notifiés (cf par exemple article 3.8.3. du CCAG Travaux pour les marchés qui s’y réfèrent), quelles que soient les éventuelles réserves formulées, cette pratique est susceptible de mettre en péril leur équilibre économique en reportant au terme du contrat - avec un aléa juridique – la question du paiement des prestations concernées.
Cette situation avait déjà été dénoncée par la DAJ, qui stigmatisait une mise en péril « de la confiance indispensable entre les parties », un effet nuisible sur les « conditions de délivrance des prestations » et l’action contentieuse susceptible d’en résulter (DAJ, Fiche technique « Les modalités de modification des contrats en cours d'exécution », avril 2019). Le législateur va plus loin avec la loi PACTE en inscrivant dans le Code de la commande publique que : « Les prestations supplémentaires ou modificatives demandées par l'acheteur au titulaire d'un marché public de travaux qui sont nécessaires au bon achèvement de l'ouvrage et ont une incidence financière sur le marché public font l'objet d'une contrepartie permettant une juste rémunération du titulaire du contrat. ».
Le principe étant rappelé dans ce nouvel article, les modalités de fixation des prix pourront s’inspirer des dispositions de l’article 14 du CCAG Travaux (dont une refonte est annoncée par la DAJ à l’horizon 2020).
Notons enfin que le nouvel article L.2194-3, dès lors qu’il intègre le Code de la commande publique, « dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 2018-1074 du 26 novembre 2018 », ne paraît applicable qu’aux seuls marchés dont la consultation a été engagée ou un AAPC publié à partir du 1er avril 2019. Mais le principe qu’il énonce peut quant à lui être plus largement invoqué. Reste à voir si l’objectif d’exemplarité des acheteurs sera rempli grâce à cette nouvelle disposition…
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