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Maison familiale détenue en démembrement de propriété

Quelques éclairages sur les principales conséquences fiscales d’une mise en location

19/07/2019

Il n’est pas rare que les membres d’une famille détiennent en commun une maison de vacances afin d’y séjourner et/ou de la mettre en location sur une période de l’année.

Lorsque la maison familiale fait l’objet d’un démembrement de propriété - ce qui est souvent le cas à la suite d’une succession - le nu-propriétaire et l’usufruitier ne supportent pas les mêmes obligations et ne bénéficient pas des mêmes avantages.

Eclairage sur les conséquences fiscales d’un tel démembrement

L’usufruitier peut décider de mettre le bien en location tout ou partie de l’année. L’usufruitier dispose alors de toutes les prérogatives d’un bailleur. Notamment, il pourra à lui seul conclure le bail, mais également encaisser les loyers.

1. Régime fiscal applicable aux loyers perçus par l’usufruitier

Une maison de vacances familiale étant généralement meublée, la mise en location de celle-ci permettra à l’usufruitier de percevoir des loyers qui seront soumis au régime des bénéfices industriels et commerciaux.

Exercent une activité de location meublée les contribuables qui louent des locaux d'habitation meublés. Les locaux doivent comporter tous les éléments mobiliers indispensables à une occupation normale par le locataire (BOI-BIC-CHAMP-40-10 n° 1).  Les meubles loués avec le local doivent être suffisants pour lui donner un minimum d'habitabilité (BOI-BIC-CHAMP-40-10 n° 10).
La location peut revêtir un caractère permanent ou simplement saisonnier.

Application du régime réel

Le bénéfice imposable est alors constitué des loyers perçus auxquels il convient de soustraire l’ensemble des charges déductibles.

S’agissant des charges, lorsque le bien est mis en location, l’usufruitier-bailleur endosse les mêmes responsabilités qu’un propriétaire. Il est ainsi tenu aux dépenses d’entretien mais doit également supporter les grosses réparations. Définies à l’article 606 du Code civil, les grosses réparations sont celles qui concernent les fondations, la structure et l’intégrité de l’immeuble (notamment les poutres, murs et toitures).

En cas d’application du régime réel, l’usufruitier pourra alors déduire les charges et frais qu’il a engagés dans le cadre de la maison, c’est-à-dire l’ensemble des dépenses de grosses réparations et d’entretien.

La question de l’amortissement du bien est alors susceptible de se poser pour l’usufruitier.

L’Administration a déjà apporté son éclairage sur le sujet1 en se prononçant sur la question de l’amortissement de l’usufruit d’un bien immobilier loué en meublé dans ces termes :

« Lorsque, à la suite d’une succession, la propriété d’un logement loué meublé est partagée entre un nu-propriétaire et un usufruitier relevant du régime réel d’imposition, les loyers sont imposables à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux entre les mains de l’usufruitier qui ne peut pratiquer aucun amortissement à raison de ce logement dès lors que celui-ci ne fait pas partie de son actif immobilisé ».

Si l’immeuble ne peut pas être amorti puisqu’il n’est pas inscrit à l’actif du bilan, il n’en demeure pas moins que le droit d’usufruit dudit immeuble pourrait être inscrit à l’actif du bilan de l’usufruitier et devrait donc pouvoir être amorti.

C’est la solution retenue par le Conseil d’Etat qui précise que l’inscription du droit d’usufruit au bilan est possible si les conditions suivantes sont réunies :

  • le droit doit constituer une source régulière de profit, être doté d’une pérennité suffisante et être susceptible d’être cédé ; et
  • l’usufruit est amené à se déprécier de manière inéluctable et il cesse nécessairement de produire ses effets bénéfiques sur l’exploitation à une date déterminée.

L’amortissement d’un droit d’usufruit temporaire, dont les effets cesseront nécessairement à une date déterminée, devrait donc pouvoir être réalisé par l’usufruitier.

La question était plus délicate s’agissant d’un usufruit viager (à défaut de terme précis d’extinction de ce droit) jusqu’à ce que la haute juridiction administrative confirme, dans un arrêt du 24 avril 2019 que la valeur de l’usufruit viager est également amortissable.

Par conséquent, l’usufruitier soumis au régime réel pourra déduire l’ensemble des charges correspondant aux dépenses d’entretien et de grosses réparations, mais également amortir son droit d’usufruit, que celui-ci soit temporaire ou viager.

Application pour le régime micro-BIC

Si le chiffre d’affaires annuel de l’usufruitier est inférieur à 70 000 euros, il pourra bénéficier du régime micro-BIC. Ainsi, un abattement de 50% sera pratiqué sur les revenus perçus.

Précisons également que même si l’usufruitier est éligible au régime micro-BIC, il peut opter pour le régime réel, notamment si cela s’avère plus intéressant au regard des charges déductibles.

2. Situation du nu-propriétaire

En principe, celui-ci ne percevant aucun loyer et n’étant tenu d’aucune charge, le démembrement ne devrait pas entraîner de conséquences fiscales majeures pour lui.

L’Administration admet2 que les dépenses qu’un nu propriétaire engage (notamment dans la perspective d’être un jour bénéficiaire de l’éventuelle plus-value de cession de la maison) sont déductibles de ses autres revenus fonciers dans les conditions de droit commun, sauf notamment lorsque l'usufruitier se réserve la jouissance du local.

Une solution similaire pourrait être retenue par analogie s’agissant des bénéfices industriels et commerciaux, dans la mesure où le nu-propriétaire percevrait des revenus de même nature d’autres propriétés meublées.

3. Outil de transmission familiale

Outre l’hypothèse d’un démembrement faisant suite à une succession, rappelons que le démembrement constitue un outil traditionnel de transmission qui présente un intérêt au plan fiscal. Le plein propriétaire peut en effet décider de donner la nue-propriété du bien à ses enfants et de conserver l’usufruit. Les droits de donation seront alors calculés sur le prix de la nue-propriété (inférieur à celui de la pleine propriété).

Au décès du parent usufruitier, la pleine propriété sera alors réunie entre les mains des enfants sans fiscalité supplémentaire.

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1 Réponse ministérielle Christophe-André Frassa du 14 décembre 2017 (n° 01401)

2 BOI-RFPI-BASE-30-20

"Maison familiale détenue en démembrement", article paru dans Le Revenu du mois de Juillet 2019


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Démembrement de propriété

Lire également : Dossier : le démembrement de propriété en matière immobilière


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