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Plateformes internet : obligations fiscales relatives aux revenus de leurs utilisateurs

D’obligations d’information a la solidarité dans le paiement de la tva

01/04/2021

Afin d’améliorer le recouvrement des prélèvements fiscaux et sociaux afférents aux revenus perçus par des personnes physiques ou morales dans le cadre de transactions intermédiées par des plateformes, le législateur a mis en place des obligations d’information qui pèsent sur ces dernières et un mécanisme de solidarité en matière de TVA. Explications.

Les revenus perçus par des personnes physiques ou morales sont par principe imposables et doivent être déclarés dans la catégorie de revenus adéquate (par exemple, en bénéfices industriels et commerciaux (BIC) pour une activité de location meublée) et donner lieu, le cas échéant, au paiement de la TVA. Encore faut-il que l’administration fiscale en ait connaissance.

Des obligations d’information renforcées pour toutes les plateformes en ligne.

La loi relative à la lutte contre la fraude (n°2018-898), publiée au journal officiel le 23 octobre 2018, s’adresse à toutes les plateformes en ligne - quel que soit leur lieu d’établissement - qui mettent en relation des personnes en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service ou de l’échange ou du partage d’un bien ou d’un service. Des obligations de deux ordres coexistent depuis le 31 décembre 2018. 

Des obligations d’information à l’égard des utilisateurs résidant en France ou qui réalisent des ventes ou des prestations de services en France (CGI, art. 242 bis et 1731 ter).

Les plateformes sont tenues de leur fournir, à l’occasion de chaque transaction, une information sur leurs obligations, avec un lien vers les sites des administrations fiscales et sociales. Le non-respect de cette obligation d’information « ponctuelle » est sanctionné par une amende forfaitaire globale spécifique dans la limite de 50 000 euros.

Les utilisateurs doivent également recevoir chaque année un récapitulatif mentionnant l’identité de l’opérateur et de l’utilisateur, le nombre et le montant brut des transactions réalisées, en indiquant de manière distincte le montant des transactions imposables en France au sens des règles de territorialité de la TVA, ainsi que le statut (particulier ou professionnel) indiqué par l’utilisateur de la plateforme et ses coordonnées bancaires si elles sont connues de l’opérateur. Le non-respect de cette obligation d’information annuelle par la plateforme est sanctionné d’une amende égale à 5 % des sommes non déclarées.

Des obligations de transmission automatique d’informations à l’administration fiscale depuis 2020 (CGI, art.  242 bis 3° et 1736 III).

Chaque année, les plateformes doivent communiquer au fisc les mêmes informations que celles qui figurent sur le récapitulatif annuel transmis aux utilisateurs, sous peine d’une amende de 5 % des sommes non déclarées. Cette transmission permettra de générer des déclarations d’impôt sur le revenu pré-remplies, mais également d’informer l’Accoss (Agence centrale des organismes de sécurité sociale) dans un objectif de lutte contre le travail dissimulé.

Par exception, l’opérateur est dispensé de communiquer ces données, s’agissant de ventes de biens d’occasion entre particuliers ou de prestations de co-consommation sans objectif lucratif et avec partage de frais, à condition que le montant total perçu par un même utilisateur sur la plateforme n’excède pas 3 000 euros ou que l’utilisateur effectue au plus 20 transactions sur cette plateforme annuellement.

L’administration fiscale française dispose donc désormais, grâce à la mise en œuvre de cette obligation, d’une source de données critiques pour identifier les utilisateurs défaillants au regard de leurs obligations fiscales et/ou sociales.

Notons que des informations complémentaires seront également à la disposition de l’administration fiscale par le biais :

  • Des registres des transactions de leurs utilisateurs que les plateformes facilitant des livraisons de biens et de services dans l’UE devront tenir à compter du 1er juillet 2021 (réforme des règles TVA du e-commerce) ;
  • De l’échange automatique d’informations qui s’imposera à l’ensemble des Etats membres de l’Union européenne en application de la directive 2021/514/CE du 22 mars 2021, dite « DAC7 » à compter du 1er janvier 2023.

La création d’un mécanisme de solidarité, pour les plateformes en ligne, en matière de TVA.

La loi relative à la lutte contre la fraude a également instauré un mécanisme de responsabilité solidaire des plateformes en matière de TVA, codifié sous les nouveaux articles 283 bis et 293 A ter du CGI et applicable depuis le 1er janvier 2020.

L’objectif de ce mécanisme (inspiré par celui mis en place au Royaume-Uni) est d’impliquer les plateformes dans le respect par leurs utilisateurs de leurs obligations en matière de TVA. Elles sont ainsi conduites à effectuer des démarches auprès de ceux soupçonnés par l’administration fiscale de se soustraire à leurs obligations. A défaut de coopération des plateformes ou en cas d’échec de leurs démarches, elles peuvent se voir réclamer le paiement de la TVA si elles continuent d’opérer pour l’utilisateur défaillant.

La mise en œuvre de ce dispositif est, bien entendu, facilitée pour l’administration fiscale par la réception des informations transmises par les plateformes dans les conditions décrites ci-dessus.

A noter que l’administration fiscale prévoit, dans ses commentaires publiés (BOI-TVA-DECLA-10-10-30-20 §30), que cette procédure peut être mise en œuvre à compter du 1er janvier 2020, y compris au titre des obligations fiscales en matière de TVA portant sur des périodes antérieures.

Ce dispositif cible les utilisateurs établis en France ou à l’étranger qui exercent leur activité par l’intermédiaire d’une plateforme en ligne telle que définie ci-dessus pour les besoins de l’article 242 bis du CGI.

La responsabilité solidaire de la plateforme a vocation à s’appliquer lorsqu’il existe des présomptions que l’utilisateur se soustrait à ses obligations en matière de déclaration ou de paiement de la TVA, dans deux situations :

  • lorsqu’un assujetti effectue ou fournit à des personnes non assujetties, des livraisons de biens ou des prestations de services dont le lieu d’imposition est situé en France en application des règles générales prévues en matière de territorialité de la TVA (articles 258 à 259 D du CGI) ;
  • lorsqu’une personne est redevable de la TVA lors de l’importation de biens (en application de l’article 293 A du CGI).

En pratique, ce mécanisme est mis en œuvre de la manière suivante :

  • étape 1 : l’administration fiscale signale à l’opérateur de plateforme en ligne l’assujetti ou la personne pour lequel/laquelle il existe des présomptions de soustraction à ses obligations en matière de déclaration ou de paiement de la TVA. Ce signalement peut prendre la forme d’un courrier en recommandé avec avis de réception (AR) ou peut être effectué par tout autre moyen en accord avec l’opérateur de plateforme en ligne, notamment par message électronique permettant d’attester de la date certaine de réception dans des conditions équivalentes au courrier recommandé AR. Les informations contenues dans ce signalement sont listées à l’article 190 de l’annexe IV au CGI.
  • étape 2 : à la suite de ce signalement, l’opérateur de la plateforme en ligne a un mois pour prendre les mesures de nature à permettre à l’assujetti ou à la personne de régulariser sa situation. Ces mesures ont été précisées par voie d’arrêté et commentées par l’administration fiscale. Il notifie ensuite à l’administration fiscale, par tout moyen permettant d’en attester la réception, la date, la nature et la preuve des mesures qu’il a prises mais aussi les éléments d’identification de l’utilisateur qui ne sont pas connus de l’administration fiscale et, le cas échéant, tout élément susceptible de permettre à l’administration de vérifier que l’utilisateur a régularisé sa situation.
  • étape 3 : si les présomptions persistent dans un délai d’un mois à compter de la notification de l’opérateur ou, à défaut, du signalement initial de l’administration fiscale, cette dernière peut mettre en demeure, par courrier recommandé ou tout autre moyen convenu, l’opérateur de plateforme en ligne de prendre des mesures supplémentaires ou, à défaut de prise de mesures supplémentaires, d’exclure l’assujetti ou la personne concerné(e) de la plateforme en ligne. Les informations contenues dans cette mise en demeure sont listées à l’article 192 de l’annexe IV au CGI.
  • étape 4 : à la suite de la mise en demeure, l’opérateur de plateforme dispose d’un délai d’un mois pour prendre les mesures supplémentaires ou exclure l’assujetti ou la personne concerné(e) de la plateforme en ligne. L’exclusion doit avoir pour effet d’empêcher l’utilisateur de réaliser toute activité en France par l’intermédiaire de la plateforme.

L’opérateur de plateforme en ligne notifie à l’administration fiscale la date, la nature et la preuve des mesures qu’il a prises (mesures supplémentaires ou exclusion) et, le cas échéant, tout élément susceptible de permettre à l’administration de vérifier que l’utilisateur a régularisé sa situation.

  • étape 5 : en l’absence de mise en œuvre des mesures supplémentaires ou de l’exclusion après un délai d’un mois à compter de la notification prévue à l’étape 4 ou, à défaut, de la mise en demeure prévue à l’étape 3, l’administration fiscale peut mettre en œuvre la responsabilité solidaire de l’opérateur de plateforme pour le paiement de la TVA dont est redevable l’assujetti ou la personne concerné(e) visé par le signalement. L’administration fiscale précise en effet que cette solidarité de paiement de la TVA est limitée au montant de TVA due sur les transactions réalisées par l’assujetti par l’intermédiaire de cet opérateur de plateforme.

A noter que seront exclues du périmètre de ce mécanisme les ventes à distance de biens importés de territoires tiers contenus dans des envois d’une valeur intrinsèque ne dépassant pas 150 euros et les livraisons de biens dans l’Union européenne par un assujetti non établi sur son territoire à une personne non assujettie à compter de l’entrée en vigueur en France de la transposition de la Directive 2017/2455 du 5 décembre 2017, soit le 1er juillet 2021. En effet, pour ces opérations, ce texte prévoit que l’opérateur de plateforme en ligne sera réputé avoir reçu et livré lui-même ces biens et il sera donc directement redevable de la TVA sur la livraison au consommateur.


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