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Quand le principe de neutralité n’est manifestement pas respecté pour l’achat d’im- meubles anciens par les marchands de biens

Les marchands de biens se trouvent confrontés à une problématique fréquente

07/10/2021

Quand le principe de neutralité n’est manifestement pas respecté pour l’achat d’immeubles anciens par les marchands de biens.

Les marchands de biens se trouvent confrontés à une problématique fréquente, et non négligeable en termes d’enjeu financier, relative à la date d’exercice du droit à déduction de la TVA grevant l’acquisition d’immeubles achevés depuis plus de cinq ans, donnés en location dans l’attente de leur revente.

Une position défavorable en matière de droit à déduction …

Malheureusement pour les professionnels de ce secteur, le Conseil d’Etat a retenu à deux reprises ces derniers mois (CE, 9e et 10e ch., 27 novembre 2020, n°426091, SNC Lips et 9e ch. 9 juin 2021, n°429498, SNC Le Cap) une position défavorable en matière de droit à déduction. Les faits étaient identiques dans les deux affaires, puisque les sociétés avaient acquis en TVA un immeuble achevé depuis plus de cinq ans. Elles avaient inscrit l’immeuble en stock, l’avaient donné en location en TVA et avaient immédiatement procédé à la déduction de la TVA grevant l’achat en l’imputant sur la taxe collectée afférente aux loyers perçus dans l’attente de la revente de l’immeuble. A l’issue d’une vérification de comptabilité, l’administration a remis en cause cette déduction, position confirmée par les différentes juridictions du fond et enfin par le Conseil d’Etat, au motif que la TVA n’était pas déductible avant la date d’exercice de l’option pour la taxation à la TVA de la revente, quand bien même l’immeuble donnerait lieu, dans l’attente de sa revente, à des opérations de location soumises à la TVA. Le raisonnement de la Haute Juridiction dans ces deux affaires est très contestable puisqu’il consiste à retenir une absence de lien direct et immédiat entre l’achat de l’immeuble et l’activité intercalaire de location. Or, cette analyse est contraire à l’abondante jurisprudence de la CJUE sur le lien direct et immédiat, aux termes de laquelle le droit à déduction s’apprécie à raison des opérations économiques auxquelles concourt immédiatement la dépense, sans qu’il soit tenu compte du but ultime poursuivi par l’assujetti (voir CJUE 11 novembre 2020, aff.42/19, Sonaecom SGPS SA pour une illustration récente). Au regard de cette jurisprudence, il est surprenant que le Conseil d’Etat ait refusé de transmettre à la CJUE la question préjudicielle posée par chacune des requérantes sur la date d’exercice du droit à déduction dans une telle hypothèse.

… qui porte atteinte au principe de neutralité

En outre, la décision du Conseil d’Etat traduit une violation manifeste du principe de neutralité. En effet, un opérateur qui affecte un immeuble à des opérations soumises à la TVA se retrouve privé de l’exercice immédiat de son droit à déduction sur le fondement de la comptabilisation de cet immeuble en stock (qui traduit, selon le Conseil d’Etat et le rapporteur public, l’intention de revendre l’immeuble, intention future qui doit primer sur l’utilisation immédiate et concrète du bien). L’on peut également s’inquiéter du fait que le rapporteur public, dans ses conclusions sous la décision SNC Le Cap, semble considérer que l’engagement de revendre pris par l’acquéreur est un critère qui détermine l’intention de revendre du marchand de biens, caractérisant un lien direct avec la revente, exclusif de tout lien avec la location, et empêchant ainsi l’exercice d’un droit à déduction immédiat.

Afin d’atténuer cette violation du principe de neutralité, il faut espérer que le Conseil d’Etat aurait admis la déduction si le marchand de biens avait différé d’un an son droit à déduction. L’immeuble ancien affecté durant cette période à une activité locative soumise à TVA est alors assimilé à une immobilisation et ouvre à ce titre droit à déduction en application de l’article 207 IV 3 de l’annexe II au CGI. Bien que le rapporteur public, en contradiction avec la jurisprudence communautaire, semble limiter ce dispositif aux seuls promoteurs, seule une nouvelle affaire permettrait à la Haute Juridiction de rassurer les opérateurs en leur accordant une déduction ultérieure de la TVA.

Article paru dans la lettre de l'immobilier de septembre 2021


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