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Nouvelle limitation de la possibilité de contester par voie d’exception

la légalité externe des actes réglementaires

16/10/2018

Par une décision du 18 mai 2018, le Conseil d’Etat a restreint les moyens susceptibles d’être invoqués à l’encontre des actes réglementaires, par la voie de l’exception d’illégalité et de la contestation d’un refus d’abrogation : les vices de forme et de procédure ne peuvent plus désormais être soulevés à l’encontre de tels actes que par voie d’action (CE, 18 mai 2018, n° 414583).

Dans l’affaire considérée, la Fédération des finances et affaires économiques de la CFDT avait engagé toutes les voies de droit pour obtenir satisfaction, et donc fourni au Conseil d’Etat une occasion parfaite de faire évoluer sa jurisprudence… Les reproches de la Fédération étaient dirigés contre le décret n° 2017-436 du 29 mars 2017, qu’elle avait contesté par voie d’action et de contestation du refus d’abroger en multipliant les moyens - notamment de forme et procédure – invoqués.
En Section du contentieux puis en Assemblée, le Conseil d’Etat a profité de cette affaire pour juger que les conditions d’édiction d’un acte règlementaire ne pouvaient être utilement critiquées que par voie d’action ; sont donc désormais inopérants les vices de forme et de procédure d’un acte réglementaire contesté par la voie de l’exception ou de la contestation du refus d’abroger. L’incompétence de l’auteur de l’acte, compte tenu de son importance, demeure en revanche invocable à l’appui de tout recours.

Cette limitation dans le temps des moyens invocables contre un acte réglementaire s’inscrit dans le courant jurisprudentiel actuel en faveur de la sécurité juridique. Il complète la jurisprudence Danthony, qui avait limité, en fonction de leurs effets, les vices de nature à entacher une décision administrative d’illégalité. Le vice affectant la procédure administrative préalable à l’adoption d’un acte - individuel ou réglementaire - ne justifie l’annulation de cet acte que s’il a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise ou s'il a privé les intéressés d'une garantie (CE, 23 décembre 2011, n° 335033).
Or, la solution Danthony n’était pas susceptible de jouer en l’espèce, puisque les illégalités invoquées (irrégularité de la consultation du Conseil supérieur de la fonction publique et différence entre le projet soumis au Conseil d’Etat et celui adopté par ce dernier) pouvaient être regardées, selon le rapporteur public, comme privant les intéressés d’une garantie. Pour favoriser la stabilité juridique des actes réglementaires, le Conseil d’Etat limite donc l’invocation de leurs vices de forme et de procédure, sans toutefois fixer de manière prétorienne, comme il a pu le faire par le passé (CE, 13 juillet 2016, n° 387763), un délai minimal pour les faire valoir autrement que par voie d’action, à l’instar de l’article L.600-1 du Code de l’urbanisme qui limite à six mois la faculté de contester par exception certains documents d’urbanisme.

Cette solution sera naturellement à prendre en compte dans le cadre du contentieux de la régulation, puisque certaines autorités de régulation sont investies d’un pouvoir réglementaire propre dont l’utilisation peut être contestée par voie d’exception (ou par celle de la contestation du refus d’abroger) et qu’il peut en aller de même à l’égard de leurs actes de droit souple (CE, 13 juillet 2016, n° 388150).


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Cet article a été publié dans notre Lettre des régulations d’octobre 2018Cliquez ci-dessous pour découvrir les autres articles de cette lettre.

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Auteurs

Sophie Weill