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Publicité comparative : Absence d’objectivité du critère du goût

Impossibilité de l’utiliser même à titre complémentaire

15/09/2020

Par un arrêt du 31 janvier 2020, la cour d’appel de Paris affirme que le goût, par nature personnel et variable, ne remplit pas la condition d’objectivité de la comparaison. Est illicite la publicité comparative qui utilise ce critère (CA Paris, 31 janvier 2020, n°18/01091).

Dans le cadre d’une campagne publicitaire, un distributeur de hard discount utilise des spots télé et radio comparant ses produits à ceux commercialisés sous une marque de fabricant. Les spots se terminent, après dégustation de chacun des produits comparés, par l’avis suivant : « Deux « j’aime » mais pas au même prix ».

Une association représentant les fabricants des produits comparés assigne ce distributeur pour publicité comparative illicite, dénigrement et parasitisme sur le fondement des articles L. 122-1 et 122--2 du Code de la consommation.

La cour d’appel de Paris retient le caractère illicite de la publicité litigieuse et condamne le distributeur au paiement de la somme d’un euro symbolique, comme demandé par l’association, à titre de dommages et intérêts.

Illicéité d’une publicité comparant le goût des produits

La licéité d’une publicité comparative est subordonnée à la réunion de plusieurs conditions prévues à l’article L. 122-1 du Code de la consommation : « 1° Elle n'est pas trompeuse ou de nature à induire en erreur ; 2° Elle porte sur des biens ou services répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif ; 3° Elle compare objectivement une ou plusieurs caractéristiques essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives de ces biens ou services, dont le prix peut faire partie. »

Seule la réunion des deux dernières conditions était contestée par l’association.

Si la cour d’appel de Paris admet le caractère d’interchangeabilité et de substituabilité des produits comparés du point de vue du consommateur, elle exclut en revanche le caractère objectif de la comparaison.

En effet, contrairement à ce que soutenait le distributeur, la Cour estime qu’en utilisant l’interjection « J’aime ! » après dégustation des produits, qui « ne constitue pas un simple constat mais une appréciation culinaire que procure la dégustation de ces produits à l’acteur figurant dans le spot publicitaire », l’intéressé avait introduit comme critère de comparaison non seulement le prix mais aussi le goût. Or, ce dernier « est par nature personnel et variable selon les habitudes alimentaires et la sensibilité de chacun ».

La seule présence de cet élément subjectif invérifiable par le consommateur excluait ainsi toute comparaison objective au sens de l’article L.122-1 3°précité et rendait donc la publicité litigieuse illicite.

Il est permis de trouver la solution sévère en l’espèce dès lors que le verdict de la dégustation a conduit au même « j’aime » pour les deux produits. La seule distinction porte sur leur prix respectif.

Pas de dénigrement, ni de parasitisme

La cour d’appel de Paris écarte tout dénigrement (art. L.122-2, 2° C. cons.) faute de démonstration d’un comportement fautif du distributeur dans l’utilisation des spots, constitutif d’un discrédit jeté sur la marque objet de la comparaison. La Cour relève que, compte tenu des éléments de comparaison, le jeu de comédie de l’annonce et le traitement humoristique de la comparaison ne contreviennent pas au principe de pratiques commerciales loyales.  

De même, la Cour rejette la qualification de parasitisme (art. L.122-2, 1° C. cons.). A cet égard, elle précise que la seule affirmation d’une notoriété n’est pas suffisante pour caractériser un acte de parasitisme et que l’absence de preuve d’investissements faits par les marques concernées exclut d’établir que le distributeur a indûment tiré profit de leur notoriété ou s’est délibérément immiscé dans le sillage des marques pour tirer profit, sans bourse déliée de leurs efforts et de leur savoir-faire.

Des sanctions limitées

Si la Cour fait droit à la demande de dommages et intérêts (un euro symbolique), elle refuse en revanche de prononcer les autres sanctions sollicitées :

  • la condamnation du distributeur à cesser toutes diffusions des films et messages radios issus des spots litigieux et/ou de développer toute publicité similaire sous astreinte, cette demande étant imprécise et trop large dans sa formulation, de sorte qu’elle aurait porté une atteinte disproportionnée aux droits de l’intéressé ;

la publication du dispositif de l’arrêt, jugée trop excessive pour sanctionner en 2020 la seule illicéité des spots diffusés en 2015.


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Auteurs

Portrait deNathalie Pétrignet
Nathalie Petrignet
Associée
Paris