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Le Conseil d’Etat précise sa jurisprudence sur l’imposition des plus-values sur titres démembrés

CE, 2 avril 2021, n° 429187

12/08/2021

Il est fréquent que des titres de sociétés soient démembrés, c’est-à-dire que l’usufruitier et la nue-propriété des titres soient détenus par des personnes différentes. Lorsque, à l’occasion d’une cession des titres en question, une plus-value est réalisée, il convient de déterminer qui, du nu-propriétaire ou de l’usufruitier, doit être considéré comme imposable sur cette plus-value.

Le Conseil d’Etat s’est récemment prononcé sur cette question (CE, 2 avril 2021, n° 429187). Au cas particulier, deux époux ont donné en 2007 la nue-propriété d’un certain nombre de titres d’une société à leurs enfants et s’en sont réservés l’usufruit. En 2009, la société en cause a racheté ses propres titres. Les parents usufruitiers ont considéré que l’impôt était dû par les enfants nus-propriétaires mais l’administration fiscale ne l’a pas entendu ainsi et a notifié aux premiers des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales.

Selon le Conseil d’Etat, « l’imposition de la plus-value constatée à la suite des opérations par lesquelles l'usufruitier et le nu-propriétaire de parts sociales dont la propriété est démembrée procèdent ensemble à la cession de ces parts sociales, se répartit entre l'usufruit et la nue-propriété selon la valeur respective de chacun de ces droits ».

L’usufruitier et le nu-propriétaire peuvent toutefois organiser leurs rapports de façon différente.

Ils peuvent, en premier lieu, décider que le prix de cession sera remployé dans l'acquisition d'autres titres eux-mêmes démembrés. D’un point de vue fiscal, le Conseil d’Etat considère alors que « lorsque les parties ont décidé que le prix de cession sera nécessairement remployé dans l'acquisition d'autres titres dont les revenus reviennent à l'usufruitier, la plus-value réalisée n'est imposable qu'au nom du nu-propriétaire ».

Les parties peuvent aussi décider que l’usufruit se reporte intégralement sur le prix de cession. Le Conseil d’Etat considère ici que « lorsque les parties ont décidé, par les clauses contractuelles en vigueur à la date de la cession, que le droit d'usufruit serait, à la suite de la cession, reporté sur le prix issu de celle-ci, la plus-value est alors intégralement imposée entre les mains de l'usufruitier ».

La décision précitée du Conseil d’Etat n’innove pas totalement. Toutefois, elle apporte une précision importante à la jurisprudence antérieure, à savoir que la plus-value est imposable au nom de l’usufruitier lorsque celui-ci conserve la faculté de remployer ou non le produit de la cession des titres dont il a l’usufruit.

Cette précision mérite l’analyse.

L’importance du caractère facultatif ou obligatoire du remploi du prix de cession

Pour que le nu-propriétaire soit imposable lorsqu’une convention prévoit le remploi du prix de cession des titres dans d’autres actifs, encore faut-il que ce remploi ait « nécessairement lieu ». Autrement dit, et comme l’indique le point 4 de la décision, « lorsque l'usufruitier conserve la faculté de remployer ou non le produit de la cession des titres dont il a l'usufruit, le droit d'usufruit doit être regardé, pour l'imposition des plus-values résultant de la cession, comme reporté sur le produit de cette cession, rendant ainsi l'usufruitier intégralement redevable de l'imposition ».

Le Conseil d’Etat, réglant l’affaire au fond, considère que l’on était bien ici en présence d’une telle faculté, et non d’une obligation, de remploi.

L’appréciation du caractère facultatif ou obligatoire a lieu au moment de la cession

Selon le Conseil d’Etat, l’appréciation du caractère facultatif ou obligatoire du remploi du prix de cession implique l’examen « des clauses contractuelles en vigueur à la date de la cession ».

De là découle, d’une part, qu’une modification des termes de la donation originelle est possible et doit être prise en compte si elle intervient avant la cession des titres donnés.

Du principe de l’examen des clauses à la date de la cession découle, d’autre part, que l’existence d’un remploi effectif du produit de cession postérieurement à celle-ci est indifférente.

On peut remarquer que la position du Conseil d’Etat (notamment en ce qu’elle distingue entre remploi facultatif et remploi obligatoire) est plus précise que la doctrine administrative qui précise que lorsque  le nu-propriétaire ou l’usufruitier a disposé de la pleine propriété des titres avant leur démembrement, « il convient de distinguer selon que le prix de vente des titres est remployé en démembrement, auquel cas la plus-value est imposable au nom du nu-propriétaire, ou est attribué au seul usufruitier dans le cadre d'un quasi-usufruit, auquel cas la plus-value est imposable au nom de l'usufruitier » (BOI-RPPM-PVBMI-20-10-20-60, n° 140).

 


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