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Panorama du contentieux social

Synthèse des décisions obtenues par CMS Francis Lefebvre Avocats

23/07/2020

Le traitement du contentieux social, que ce soit en matière civile, devant les Conseils de prud’hommes et les Cours d’appel, ou en matière administrative ou pénale, nécessite un haut degré d’expertise de la matière et une pratique très régulière devant les juridictions.

Notre équipe a développé avec succès depuis plus de 20 ans une activité résolument tournée vers l’activité judiciaire et contentieuse.

Nous avons souhaité vous faire partager notre expérience et notre pratique, car les décisions obtenues devant les juges de première et de seconde instances sont aussi nombreuses que précieuses, en ce sens qu’elles viennent compléter et appliquer les principes définis par la Cour de cassation.

Elles peuvent également, dans certains cas, trancher des litiges qui n’ont pas encore fait l’objet de décisions de principe de la Cour de cassation.

Elles sont ainsi susceptibles de vous servir de guide face aux situations que vous avez à gérer, d’aide à la décision en matière précontentieuse, ou de repère dans la gestion de vos contentieux.  

Nous avons donc fait le choix de partager ces différentes sources jurisprudentielles, et de porter régulièrement à votre connaissance, le contenu sommaire des décisions les plus intéressantes et instructives pour vous, sous la forme d’un Panorama du contentieux social.

Ce premier Panorama du contentieux social, plus dense dans son contenu que ceux à venir, recense les décisions rendues et obtenues au cours du premier semestre de l’année 2020.

Rodolphe Olivier, auteur de cette contribution, est à l’écoute de vos commentaires et suggestions pour que ce rendez-vous judiciaire régulier vive et corresponde, au plus près, à vos attentes et préoccupations.

Nous restons bien entendu à votre disposition pour vous apporter toute précision que vous pourriez souhaiter sur ces décisions et pour vous accompagner et vous assister dans les démarches judiciaires et contentieuses impliquant les entreprises que vous représentez, devant toutes les juridictions au sein desquelles le droit du travail et le droit de la sécurité sociale et de la protection sociale ont vocation à recevoir application.

I. Egalité de traitement

a. Treizième mois : série de jugements du conseil de prud’hommes de Marseille du 29 janvier 2020

Dans une série de sept jugements rendus par le conseil de prud’hommes de Marseille (formation de départage) le 29 janvier 2020, plusieurs salariés (travaillant sur site) ont été déboutés de leur demande tendant à l’octroi d’une prime de 13e mois perçue par d’autres salariés (travaillant au siège).

Le Conseil de prud’hommes a estimé que les salariés n’étaient pas fondés en leurs demandes au motif, notamment, que « les salariés avec lesquels ils se comparent , et qui perçoivent la prime de 13e mois, exercent des fonctions plus importantes que celles qui leur étaient confiées avec des niveaux de compétence (diplôme, connaissances, capacités, expérience), d’autonomie et de polyvalence sensiblement supérieurs, justifiant de façon objective et pertinente la disparité de traitement résultant de l’attribution d’une prime de 13e mois à ces salariés ».

Secteur d’activité concerné : sécurité

b. Prime de fin d’année : série d’arrêts de la cour d’appel d’Aix-en-Provence du 14 février 2020

Dans une série de huit arrêts rendus le 14 février 2020, la cour d’appel d’Aix en Provence a débouté plusieurs salariés de leur demande tendant, notamment, à l’octroi d’une prime de fin d’année perçue par certains salariés d’un établissement déterminé.

Ladite prime de fin d’année trouvait sa source dans un accord collectif, de telle sorte que devait s’appliquer par voie de conséquence le principe de présomption de justification des différences de traitement entre les salariés appartenant à la même entreprise, mais affectés à des établissements distincts.

La Cour d’appel a reconnu l’existence d’un accord collectif (non signé par l’employeur) et a appliqué le principe de présomption précité.

Secteur d’activité concerné : nettoyage/propreté

c. Plan de sauvegarde de l’emploi et indemnités supra légales : jugement du conseil de prud’hommes de Tours du 11 mars 2020

Dans un jugement en date du 11 mars 2020, le conseil de prud’hommes de Tours a débouté un salarié de sa demande de rappel d’indemnité supra légale de licenciement et résultant d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE). Le salarié se prévalait du principe d’égalité de traitement.

Le PSE, établi par accord collectif d’entreprise, précisait qu’afin « de compenser le préjudice subi par les salariés du fait de la perte de leur emploi, la société versera à tout salarié dont le contrat de travail serait rompu dans le cadre du présent plan, une indemnité supplémentaire de rupture s’ajoutant à l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement, d’un montant de 15 000 euros bruts, sans condition d’ancienneté. Cette indemnité sera portée à (….) 55 000 euros bruts pour les salariés ayant entre 25 et 29 ans d’ancienneté ». L’indemnité globale était cependant plafonnée à
100 000 euros.

Le salarié, n’ayant perçu qu’une prime supra légale de 15 000 euros, a sollicité un complément de
40 000 euros. Il mettait en avant, pour ce faire, qu’il justifiait d’une ancienneté de 29 ans et que d’autres salariés, comptant également une ancienneté comprise entre 25 et 29 ans, ont bénéficié quant à eux d’une prime supra légale soit de 55 000 euros, soit en tout état de cause d’un montant supérieur à 15 000 euros.

Le Conseil de prud’hommes a estimé que l’employeur expliquait cette disparité par l’effet du plafonnement à 100 000 euros de la somme globale versée tenant compte des indemnités légales et conventionnelles et de l’indemnité supra légale, que ce plafonnement s’appliquait à l’ensemble des salariés, et qu’il y avait par ailleurs nécessité de rééquilibrer l’enveloppe financière globale entre tous les salariés, afin que chacun d’eux soit indemnisé de la meilleure des manières qui soit.

Il a ajouté que bien qu’un impératif budgétaire ne puisse justifier nécessairement une différence de traitement entre les salariés, il était loisible aux partenaires sociaux d’introduire dans le PSE négocié un plafonnement permettant de privilégier les salariés percevant de bas salaires, afin de ne pas les priver d’une juste réparation de leur préjudice lié à la perte d’emploi.

Secteur d’activité concerné : plasturgie

II. Salarié protégé et modification du contrat de travail/des conditions de travail

Dans un litige tranché par la cour d’appel d’Aix-en-Provence le 13 mars 2020, l’employeur a envisagé une modification du rattachement administratif d’un salarié protégé d’une agence A à une agence B (au même titre que plusieurs dizaines d’autres salariés).

Un accord d’entreprise conclu au sein de cette entreprise précisait qu’en pareil cas, le salarié perdait son mandat de délégué syndical.

Le salarié a saisi la formation de référé du conseil de prud’hommes de Martigues, de demandes tendant, notamment, à sa réintégration dans les effectifs de l’établissement d’origine, sous astreinte, de paiement des heures de délégation perdues en conséquence de la perte de son mandat, ainsi que de dommages et intérêts.

La formation de référé (départage) du conseil de prud’hommes de Martigues, aux termes d’une ordonnance en date du 14 septembre 2019, a dit n’y avoir lieu à référé.

Dans l’arrêt qu’elle a rendu le 13 mars 2020, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a estimé que le salarié ne s’est vu imposer aucune modification de son contrat de travail, s’agissant d’un simple transfert de rattachement administratif emportant uniquement changement d’en-tête sur les plannings et sur les bulletins de paie. La Cour d’appel a souligné par ailleurs que le salarié a continué à travailler dans les mêmes conditions en termes de lieu de travail, d’horaires de travail, de fonctions, de missions et de rémunération.

La Cour d’appel a en conséquence confirmé l’ordonnance rendue par le conseil de prud’hommes de Martigues.

Secteur d’activité concerné : sécurité

III. Durée du travail

a. Forfaits-jours et heures supplémentaires

1. Appréciation des preuves apportées par le salarié : arrêt de la cour d’appel de Versailles du 29 janvier 2020

Au terme d’un arrêt du 29 janvier 2020, la cour d’appel de Versailles a débouté un salarié de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice qu’il estime avoir subi du fait de la violation, par l’employeur, des règles relatives au temps de travail.

Le salarié soutenait notamment qu’il n’a pas récupéré l’intégralité de ses heures pour les années 2011 et 2012. Il produisait ses plannings afférents à ces deux années, ainsi qu’une note de service en date du 5 mars 2014.

Pour débouter le salarié de sa demande, la Cour d’appel a exposé, notamment :

  • qu’il produisait une note relative au temps de travail qui n’était pas applicable à la période litigieuse puisqu’elle datait de 2014 ;
  • que s’agissant des plannings, il se contentait de dire qu’il était « manifeste » qu’il n’a pas récupéré l’intégralité de ses heures sans fournir au juge la moindre explication, alors qu’il résultait de la lecture de ses plannings, « peu explicites pour les profanes, voire incompréhensibles comme l’ont relevé les premiers juges », qu’ils ne peuvent être valablement exploités et soumis à la contradiction de l’employeur sans « clé de lecture ».

Secteur d’activité concerné : chimie

2. Appréciation des preuves apportées par le salarié : jugement du conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt du 4 juin 2020

Au terme d’un jugement du 4 juin 2020, le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt a débouté un salarié de sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires.

Pour ce faire, le Conseil de prud’hommes a considéré :

  • d’une part que le salarié travaillait dans le cadre d’un forfait annuel en jours mis en place par un accord de réduction du temps de travail que l’employeur « a correctement appliqué » ;
  • d’autre part que le salarié :
    • ne démontrait pas la réalité du temps de travail effectué ;
    • fournissait un tableau avec des heures de début et des heures de fin, avec généralement une arrivée à 9 heures et un départ à 20 heures, et parfois une amplitude plus longue ;
    • ne décomptait pas son temps de déjeuner et ses jours de récupération du temps de travail ;
    • se voyait reprocher parallèlement par son employeur d’arriver tardivement le matin.

Secteur d’activité concerné : télévisuel

b. Jours de repos liés à la réduction du temps de travail (JRTT)

Le conseil de prud’hommes de Versailles, dans un jugement du 11 mars 2020, a estimé que la mention des jours de RTT sur le bulletin de paie ne pouvait être retenue comme une preuve suffisante du nombre de jours de RTT restant dus à une salariée et a débouté cette dernière de sa demande en paiement desdits jours.

Secteur d’activité concerné : médical

c. Travail dissimulé

Dans un jugement qu’il a rendu le 23 janvier 2020, le conseil de prud’hommes de Martigues a estimé qu’aucun travail dissimulé n’était caractérisé lorsque le salarié, rattaché à un établissement de l’entreprise, était amené à travailler au sein d’autres établissements de la même entreprise.

Secteur d’activité concerné : nettoyage/propreté

d. Salaire/Bonus

Le conseil de prud’hommes de Paris, dans un jugement du 26 février 2020, a débouté un salarié de ses demandes tendant au paiement d’un bonus au titre des années 2015, 2016 et 2017.

Le salarié estimait avoir été illicitement privé de son bonus contractuel au titre des exercices précités.

Il considérait être en droit de bénéficier de l’intégralité du montant de ses bonus pour ces années, tels que définis dans son contrat de travail, au motif selon lui qu’aucun objectif ne lui aurait été fixé pour chacun de ces exercices.

Le Conseil de prud’hommes a débouté le salarié de ses demandes aux motifs suivants :

  • contrairement à ce qu’il affirmait, il avait parfaitement connaissance des objectifs qui lui étaient assignés pour chacune de ces années ;
  • le chiffre d’affaires de l’entreprise s’est régulièrement dégradé ;
  • il apparaissait d’autant moins fondé à réclamer le paiement de son bonus contractuel pour l’année 2017 que ses multiples défaillances dans l’exercice de ses fonctions (directeur de réseau) ont conduit à son licenciement pour insuffisance professionnelle.

Secteur d’activité concerné : bijouterie joaillerie

IV. Harcèlement moral

a. Mutation et dégradation de la relation avec la hiérarchie : jugement du conseil de prud’hommes de Cannes du 19 décembre 2019

Le 19 décembre 2019, le conseil de prud’hommes de Cannes a débouté une salariée de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral et manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.

Dans cette affaire, une salariée, initialement affectée sur l’agence Côte d’Azur, a demandé sa mutation en Alsace, ce qui lui a été accordée en 2012.

De nombreux échanges par mails avec sa hiérarchie ainsi qu’avec les délégués du personnel, ont émaillé l’année 2013 et le début de l’année 2014, et faisaient état de difficultés vécues au sein de l’agence d’Alsace.

Pendant cette période, la salariée s’est trouvée en arrêt de travail pour syndrome dépressif, puis a fait une tentative de suicide lors de ses congés.

A l’occasion d’une réunion avec le CHSCT, a été décidée la mise en place d’une délégation d’enquête interne.

La Direction a confié à un intervenant extérieur un autodiagnostic de fonctionnement et de communication au sein de l’agence d’Alsace, qui a abouti à la remise d’un rapport.

La salariée a par la suite été hospitalisée, puis déclarée apte par la médecine du travail à l’occasion de la visite de reprise.

Pour débouter la salariée de sa demande de dommages et intérêts, le Conseil de prud’hommes a estimé que si la Direction était consciente de la dégradation des conditions de travail de l’ensemble de l’agence d’Alsace, elle a tenté d’y remédier.

Il a cependant condamné l’employeur à des dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité en retenant que l’employeur, bien que conscient des difficultés relationnelles au sein de l’équipe de l’agence d’Alsace, a trop tardé dans la prise de mesures adaptées, et qu’il a fallu la tentative de suicide de la salariée pour qu’il prenne enfin la pleine conscience des difficultés rencontrées.

Secteur d’activité concerné : service public de l’emploi

b. Absence de dénonciation préalable d’un harcèlement moral : jugement du conseil de prud’hommes de Cannes du 7 février 2020

Le 7 février 2020, le même conseil de prud’hommes de Cannes a débouté un salarié de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral et manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.

Il a retenu pour cela que le salarié ne s’est jamais plaint d’un harcèlement moral, que lors de sa visite auprès de la médecine du travail, intervenue à son initiative, il n’a pas fait mention de son mal être, et que les mails envoyés par son supérieur hiérarchique ne caractérisaient pas un harcèlement.

Secteur d’activité concerné : industriel

c. Absence de dénonciation préalable d’un harcèlement moral et appréciation des preuves apportées par le salarié : jugement du conseil de prud’hommes de Paris du 26 février 2020

Le 26 février 2020, le conseil de prud’hommes de Paris a débouté un salarié de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral.

Le salarié a indiqué avoir subi « des manœuvres de déstabilisation ressortant d’un véritable harcèlement professionnel ».

Le Conseil de Prud’hommes, pour débouter ce salarié de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral, a retenu, notamment :

  • qu’il ne s’est jamais plaint, au cours de la relation de travail, de telles pressions émanant de son employeur ;
  • qu’il n’indiquait au demeurant pas qu’il a subi des pressions ayant pris la forme de remontrances, de promesses non tenues, lui ôtant toute perspective professionnelle ou de tentatives d’exclusion pour l’encourager à démissionner ;
  • qu’il ne produisait pas davantage d’éléments médicaux susceptibles d’établir une dégradation de son état de santé et de faire un lien entre cette situation et les prétendues « manœuvres de déstabilisation » dont il aurait fait l’objet ;
  • qu’au contraire, il s’est borné à soutenir qu’il aurait été soumis aux sollicitations insistantes de la société durant ses périodes de repos ou de congés, qu’il aurait été privé de façon discrétionnaire et abusive de sa rémunération variable ;
  • que certains avantages stipulés dans son contrat de travail auraient été supprimés ;
  • qu’il était très sollicité par sa hiérarchie et était astreint à des sujétions permanentes, y compris durant ses périodes de congés et de repos. Pour étayer cette allégation, il produisait plusieurs SMS envoyés par la Directrice d’investissements d’une société, révélant selon lui que cette dernière « l’interpellait de manière éreintante » à des heures tardives ou le week-end. Le Conseil de prud’hommes a retenu pour sa part que la majorité des dates et heures des échanges invoqués par le salarié étaient illisibles et, partant, ne sauraient constituer des communications tardives ou le week-end.

Il en a conclu qu’en l’état des explications et des pièces fournies, la matérialité d’éléments de fait précis et concordants laissant supposer l’existence d’un harcèlement moral n’était pas démontrée. De telle sorte que les demandes relatives au harcèlement moral devaient être rejetées.

Secteur d’activité concerné : bijouterie joaillerie

d. Incidence d’une enquête interne : arrêt de la cour d’appel de Versailles du 5 mars 2020

Le 5 mars 2020, la cour d’appel de Versailles a débouté une salariée de sa demande tendant à l’octroi de dommages et intérêts pour harcèlement moral.

La salariée mettait en avant, à l’appui de sa demande, une tentative de rétrogradation de la part de son employeur, son remplacement par un autre salarié au service contentieux et le retrait de certaines de ses tâches. Elle précisait également que cette situation a altéré son état de santé, et déplorait l’absence d’enquête du CHSCT sur les faits qu’elle a dénoncés.

La Cour d’appel a certes relevé que la dégradation de l’état de santé de la salariée était établie par les divers éléments médicaux versés aux débats. Mais elle a estimé toutefois que la salariée ne prouvait pas la matérialité des éléments de fait invoqués au soutien de sa demande au titre du harcèlement moral.

Elle a également débouté la salariée de sa demande tendant à l’octroi de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du harcèlement moral et de celui résultant du manquement de l’employeur à son obligation de prévention des agissements de harcèlement moral. Pour ce faire, la Cour d’appel a notamment retenu :

  • que la salariée a saisi une institution de médiation interne à l’entreprise (appelée « ombuds ») ;
  • que l’existence d’une telle institution, qui peut être ainsi saisie, constitue un élément de prévention des situations de harcèlement ;
  • que ces « ombuds » ont mené une enquête, interrogé 22 personnes, et conclu à l’absence de harcèlement moral dans un rapport présenté au CHSCT ;
  • que l’enquête apparaissait sérieuse, malgré les critiques de la salariée, et marquait une réaction effective aux faits dénoncés ;
  • que les faits dénoncés et le résultat de l’enquête ont été discutés au sein du CHSCT ;
  • que l’employeur a répondu à la lettre que la salariée lui a adressée pour articuler les griefs qu’elle lui reprochait, et dans laquelle elle évoquait sa souffrance au travail ;
  • que la salariée a eu un entretien avec le directeur commercial et que le RRH a également tenté de la rencontrer.

De telle sorte que, selon la Cour d’appel, l’employeur a bien réagi aux alertes formées par la salariée pour traiter la situation de harcèlement qu’elle dénonçait, mais dont la réalité a été écartée.

Secteur d’activité concerné : affacturage

e. Déclaration d’inaptitude et situation de harcèlement moral : jugement du conseil de prud’hommes de Versailles du 11 mars 2020

Le 11 mars 2020, le conseil de prud’hommes de Versailles a débouté un salarié de sa demande tendant à l’octroi de dommages et intérêts pour harcèlement moral en retenant, notamment :

  • que le salarié n’apportait aucun fait laissant présumer l’existence d’un harcèlement moral ;
  • que les courriers émis par l’employeur n’ont été que la conséquence d’une déclaration d’inaptitude avec réserves rendue par le médecin du travail, puis du refus non motivé du salarié d’accepter les modifications de ses horaires conformes aux prescriptions du médecin du travail, puis des absences sans motifs du salarié ;
  • que le délai pris par l’employeur pour la mise en œuvre de la procédure de licenciement après l’avis du médecin du travail était lié à la période des fêtes de fin d’année et ne pouvait être considéré comme un fait répété.

Secteur d’activité concerné : médical

f. Charge de travail et harcèlement moral : jugement du conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt du 4 juin 2020

Le 4 juin 2020, le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt a débouté un salarié de sa demande tendant à l’octroi de dommages et intérêts en raison de la violation, selon lui, de son obligation de sécurité

Le salarié (journaliste) reprochait à son employeur de l’avoir fait travailler d’affilée entre le 18 et le 24 mars 2016, de l’avoir contraint à effectuer 65 heures 15 par semaine entre le 22 juillet 2013 et le 30 juin 2016, et d’avoir mis en place un système d’astreinte contraignant les journalistes à rester en permanence au sein de la société. Il faisait alors grief à son employeur de l’avoir mis en danger à plusieurs occasions.

Ce à quoi le Conseil de prud’hommes a notamment répondu, pour débouter le salarié de cette demande, que :

  • le salarié effectuait son travail selon un forfait annuel de 208 jours et faisait l’acquisition de jours de récupération ;
  • les organisations syndicales ont signé l’accord de réduction du temps de travail des journalistes ;
  • lors de ses entretiens annuels d’évaluation 2014 et 2015, le salarié ne s’est pas plaint d’un déséquilibre entre sa vie professionnelle et sa vie personnelle ;
  • à aucun moment le salarié, lors de l’exécution de son contrat de travail, n’a saisi son employeur, les représentants du personnel, le médecin du travail ou l’inspection du travail ;
  • le médecin du travail a constaté son aptitude physique ;
  • concernant sa sécurité, le salarié ne démontre pas avoir été mis en danger au mois de mai 2016 comme il le soutenait.

Secteur d’activité concerné : télévisuel

V. Harcèlement sexuel

Le conseil de prud’hommes de Nancy, aux termes d’un jugement qu’il a rendu le 11 décembre 2019, a estimé que le licenciement d’un salarié prétendument « harceleur sexuel » était justifié.

Dans cette affaire, le salarié a agressé sexuellement une jeune femme volontaire en service civique, affectée dans la même agence que lui, laquelle a déposé une plainte pénale.

Les faits décrits dans la plainte faisaient état de ce qui suit :

  • alors qu’il se trouvait en arrêt maladie, le salarié a attendu la jeune fille devant l’agence ;
  • le salarié a proposé à la jeune fille de l’accompagner en voiture jusqu’à la salle de sport, ce qu’elle a accepté, ayant jusqu’ici avec lui des rapports cordiaux ;
  • durant le trajet, le salarié a eu des propos déplacés quant au physique de la jeune fille et, à l’issue du trajet, il a procédé à des attouchements non consentis sur cette dernière ;
  • alors qu’elle lui a clairement indiqué qu’elle ne souhaitait pas avoir de relations avec lui, il lui a demandé de nouveau un baiser ;
  • le lendemain après-midi, particulièrement insistant, le salarié a envoyé 3 SMS à la jeune fille pour la rencontrer à nouveau et hors du cadre professionnel.

Le Conseil de prud’hommes a relevé également que ce salarié avait eu un comportement de même nature avec d’autres salariées auparavant et que l’employeur « avec beaucoup d’indulgence a permis au salarié de se ressaisir », ce que le salarié ne fera pas.

Il a même indiqué, dans son jugement, qu’il « s’étonne même que l’employeur ait fait preuve d’une telle mansuétude et ne se soit pas engagé plus avant dans des mesures plus sévères ».

Secteur d’activité concerné : service public de l’emploi


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VI. Santé au travail et CSE : pas de consultation obligatoire du CSE en cas de modification du DUER

Contrairement à ce qu’a décidé la cour d’appel de Versailles dans l’affaire Amazon, le tribunal judiciaire de Lyon, aux termes d’une ordonnance en date du 22 juin 2020, a jugé que le CSE n’avait pas à être consulté sur l’évaluation des risques et la mise à jour du document unique d’évaluation des risques (DUER).

Il a estimé en outre qu’était suffisante la seule consultation du CSE central sur le plan de déconfinement décidé au niveau central.

Secteur d’activité concerné : travail temporaire

VII. Concurrence déloyale

La cour d’appel de Paris, aux termes d’un arrêt en date du 25 juin 2020, a condamné in solidum l’ancien directeur général d’une société (A) ainsi que d’autres sociétés (au nombre de 4) à la somme de 260 000 euros en réparation des actes de concurrence déloyale par débauchage fautif dont ces acteurs se sont rendus coupables.

La société (A) reprochait à son ancien directeur général un comportement fautif à partir du mois de mars 2014, car déloyal et contraire à l’intérêt de la société. Elle prétendait en effet que son directeur général a pris des décisions managériales contraires à l’intérêt social et qu’il a participé à sa désorganisation par un débauchage actif et massif de salariés au profit de sociétés concurrentes, dans la création et le développement desquelles il s’est impliqué.

Secteur d’activité concerné : transport ferroviaire

VIII. Licenciement

a. Discrimination raciale / nullité du licenciement :

Dans un litige tranché par le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt le 4 juin 2020, le salarié sollicitait notamment la nullité de son licenciement motif pris de l’existence d’une discrimination raciale dont il aurait été la victime.

Il a saisi le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt ainsi que, parallèlement, le Défenseur des Droits.

Le Défenseur des Droits est intervenu volontairement à l’audience. Il a conclu, avant comme après la saisine prud’homale, à l’existence d’une discrimination raciale.

Le Conseil de Prud’hommes, par un jugement très motivé, a débouté le salarié de l’intégralité de ses demandes, et en particulier de celles en lien avec l’existence d’une discrimination raciale.

Secteur d’activité concerné : télévisuel

b. Licenciement pour faute grave

Le conseil de prud’hommes d’Arles, aux termes d’un jugement en date du 30 janvier 2020, a débouté un salarié de l’ensemble de ses demandes portant, notamment, sur la contestation de son licenciement pour faute grave.

Ledit licenciement pour faute grave du salarié était motivé par un comportement irrespectueux et des insultes proférées à l’égard de sa hiérarchie et de ses collaborateurs, par une attitude déplacée et agressive à l’égard des salariés placés sous sa responsabilité, par un détournement des procédures de l’entreprise à des fins personnelles, par une insuffisance professionnelle et une mauvaise gestion des sites et par une atteinte à l’image de l’entreprise.

Secteur d’activité concerné : nettoyage/propreté

c. Licenciement pour cause réelle et sérieuse :

1. Insuffisance professionnelle / insuffisance de résultats

i. Arrêt de la cour d’appel de Paris du 8 janvier 2020

La cour d’appel de Paris, aux termes d’un arrêt qu’elle a rendu le 8 janvier 2020, a estimé qu’était légitime le licenciement d’un salarié licencié pour insuffisance professionnelle (la lettre de licenciement reprochait au salarié une absence de réponse dans les délais au regard des réclamations des clients, une absence de pilotage et un défaut de management).

Secteur d’activité concerné : industriel

ii. Jugement du conseil de prud’hommes de Martigues du 23 janvier 2020

Le conseil de prud’hommes de Martigues, dans un jugement du 23 janvier 2020, a estimé que le licenciement d’un salarié (Responsable QHSE) était fondé et l’a débouté de ses demandes.

Le motif du licenciement reposait sur les insuffisances professionnelles du salarié, le non-respect par ce dernier des consignes émanant de ses supérieurs hiérarchiques, ainsi que son défaut d’organisation et d’accomplissement des tâches, sa déficience par rapport à la déontologie du métier (fautes professionnelles ayant entraîné la mise en danger des collaborateurs, la responsabilité pénale du directeur d’agence comme la sienne et les risques financiers pour l’agence), ses attitudes et agissements ayant conduit à une rupture du lien de confiance et une atteinte à l’image de l’entreprise.

Secteur d’activité concerné : nettoyage/propreté

iii. Jugement du conseil de prud’hommes de Paris du 26 février 2020

Le conseil de prud’hommes de Paris a jugé le 26 février 2020, qu’était justifié le licenciement d’un salarié (directeur de réseau exerçant parallèlement le mandat social de directeur général au sein de plusieurs des sociétés du groupe) dont le contrat de travail a été rompu en conséquence d’un manque de rigueur et d’implication dans la gestion des équipes de vente, d’un manque de professionnalisme dans la gestion du merchandising, d’un manque de professionnalisme dans l’entretien et la tenue des boutiques, de l’absence de présentation de modèle de stocks conformes aux attentes de la société, d’un manque de rigueur dans la gestion des « confiés » et l’organisation d’une soirée au sein des locaux de l’entreprise à l’insu de la Direction.

Secteur d’activité concerné : bijouterie joaillerie

iv. Arrêt de la cour d’appel de Douai du 28 février 2020

La cour d’appel de Douai, par un arrêt en date du 28 février 2020, a jugé qu’était légitime le licenciement d’un salarié licencié pour insuffisance quantitative de résultats issue d’un manque d’investissement dans son travail (non atteinte des objectifs de signature en raison notamment de contacts téléphoniques et de rendez-vous clients insuffisants) ainsi qu’une saisie défectueuse des éléments de suivi commercial, conséquence de son absence de maitrise du logiciel.

Secteur d’activité concerné : location de véhicules de longue durée

2. Absences longues et perturbant le bon fonctionnement de l’entreprise

Dans un jugement qu’il a rendu le 7 février 2020, le conseil de prud’hommes de Cannes a estimé qu’était justifié le licenciement d’un salarié s’étant trouvé en arrêt de travail pour maladie du 28 septembre 2016 au 31 juillet 2017 en raison de la perturbation engendrée par ses différentes absences (arrêts successifs de 15 jours à 2 mois).

Pour ce faire, le Conseil de prud’hommes a relevé que l’entreprise a été obligée de se réorganiser constamment, et de faire reposer sur les autres salariés une surcharge de travail, du fait de son manque de visibilité sur les absences du salarié.

Il a estimé de la même manière que l’employeur avait respecté les dispositions de la convention collective prévoyant une garantie d’emploi en cas de maladie pendant une certaine durée, ainsi que la réalisation d’un formalisme précis.

Secteur d’activité concerné : industriel

3. Inaptitude physique constatée par le médecin du travail

Dans un jugement du 11 mars 2020, le conseil de prud’hommes de Versailles a estimé qu’était fondé le licenciement d’une salariée licenciée en conséquence de son inaptitude physique.

Aux arguments de la salariée selon lesquels l’employeur ne démontrait ni avoir consulté les délégués du personnel, ni avoir entrepris de recherches de reclassement, le Conseil de prud’hommes a répondu, notamment :

  • que l’avis d’inaptitude, précisant : « inapte à son poste de travail, tout maintien dans l’entreprise serait préjudiciable à sa santé », n’a pas été contesté par la salariée ;
  • que l’employeur a bien informé la salariée de l’impossibilité de reclassement avant d’initier la procédure de licenciement, conformément à l’article L.1226-2-1 du Code du travail ;
  • que la salariée reconnaissait dans ses écritures que le licenciement était possible dès le premier refus d’adaptation du poste de travail lors de l’avis initial d’aptitude sous réserves ;
  • que s’agissant d’une impossibilité de reclassement dans l’entreprise, en application de l’article L.1226-2-1 du Code du travail, un avis formel des délégués du personnel n’était pas nécessaire ;
  • que l’employeur a fourni la preuve de ses démarches tendant à la recherche de solutions de reclassement dans le groupe, même si l’âge de la salariée et l’avis d’inaptitude ambigu de la médecine du travail (inaptitude dans l’entreprise et non inaptitude à tout emploi) rendait cette démarche stérile ;
  • l’âge de la salariée (62 ans), ses 44 années de cotisations et son avis d’inaptitude la rendait éligible à une retraite à taux plein.

Secteur d’activité concerné : médical

IX. Prise d'acte

a. Violation des règles de sécurité : arrêt de la cour d’appel de Versailles du 29 janvier 2020

Le 29 janvier 2020, la cour d’appel de Versailles a débouté un salarié de l’ensemble de ses demandes, et notamment d’une demande de requalification de sa démission en une prise d’acte de la rupture de son contrat de travail aux torts exclusifs de l’employeur.

Le salarié faisait valoir qu’il était fondé à prendre acte de la rupture de son contrat de travail en raison selon lui de la violation continue des règles de sécurité par son employeur. Il prétendait notamment avoir subi une infection respiratoire liée à la fuite de produits toxiques dans l’entreprise qui est classée SEVESO seuil O.

La Cour d’appel a relevé que l’employeur avait pris toutes les mesures de protection nécessaires, et que la prise d'acte du salarié devait produire les effets d'une démission.

A noyer que le salarié a également été débouté de sa demande au titre du préjudice d’anxiété lié à la prétendue violation, par l’employeur, de son obligation de sécurité.

Secteur d’activité concerné : chimie

b. Harcèlement moral : arrêt de la cour d’appel de Versailles du 5 mars 2020

La cour d’appel de Versailles, par un arrêt en date du 5 mars 2020, a débouté une salariée de sa demande de requalification de sa prise d’acte en un licenciement nul ou à tout le moins sans cause réelle et sérieuse au motif de l’existence, selon la salariée, d’un harcèlement moral dont elle aurait été la victime.

La Cour a estimé que les griefs que la salariée imputait à son employeur (rétrogradation, son remplacement par un autre salarié et le retrait de ses tâches, mise en danger de sa santé entraînant une dégradation dudit état de santé) n’étaient pas établis, et qu’en conséquence la prise d’acte devait s’analyser en une démission.

Secteur d’activité concerné : affacturage

X. Résiliation judiciaire

Au terme d’un arrêt en date du 24 juin 2020, la cour d’appel de Paris, statuant sur renvoi après cassation, a débouté un salarié de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur.

Dans cette affaire, le salarié avait saisi le Conseil de prud’hommes d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, invoquant des manquements de l’employeur du fait du non-paiement / paiement tardif / paiement partiel de plusieurs bonus sur différentes périodes (dont il demandait également le rappel), avant d’être licencié pour insuffisance professionnelle.

La Cour de cassation ayant retenu que l’un des bonus (le bonus de performance), prévu par le contrat de travail, s’entendait d’un bonus discrétionnaire et non d’une rémunération variable sur objectifs, le salarié cherchait à démontrer devant la Cour d’appel de renvoi que le versement des bonus chaque année caractérisait un usage. Il en a été débouté.

S’agissant de la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, la cour d’appel de Paris a estimé que « aussi importante soit la somme due au titre de la période 2012-2013, l’absence de versement à bonne date de ce complément de rémunération ne pouvait à lui seul justifier la résiliation judiciaire, étant précisé que la société était en droit de diminuer le montant de ce bonus et que concernant la rémunération additionnelle, son versement n’était prévu qu’en décembre 2013 et février 2014 », ce dont elle a déduit que « la poursuite du contrat de travail n’était pas rendue impossible du fait du seul retard apporté au paiement ».

Se prononçant par ailleurs sur la cause réelle et sérieuse du licenciement, la Cour d’appel de renvoi a d’abord considéré que le grief d’un motif économique caché devait être écarté.

Retenant notamment que « même si les critères d’évaluation ne correspondent pas à ceux communément usités, mais reposent davantage sur des valeurs, les mesures quantitatives n’en sont pas absentes et en tout état de cause, X était informé de l’importance accordée à certains points, dont l’ « impact » du partenaire soumis à une évolution tenant compte de son ancienneté notamment », la cour d’appel de Paris a jugé que « l’insuffisance de performances du salarié dans le cadre de son activité, pour ce niveau de responsabilité et de rémunération, était caractérisée par son incapacité objective et pendant 24 mois à exécuter de façon satisfaisante et conforme aux attentes de la société, l’emploi de directeur associé, étant précisé qu’aucun facteur extérieur n’est venu interférer ».

Secteur d’activité concerné : conseil/consulting

XI. Rupture conventionnelle

Par un jugement en date du 9 janvier 2020, le conseil de prud’hommes de Paris (départage) a débouté un salarié de sa demande tendant à l’annulation de la rupture conventionnelle qu’il a conclue avec son employeur.

Le Conseil de prud’hommes a relevé, pour ce faire :

  • que les parties ont signé une rupture conventionnelle dans des conditions protectrices pour le salarié au regard du nombre d’entretiens intervenus et de l’assistance dont il a bénéficié ;
  • que l’administration du travail a homologué la rupture conventionnelle ;
  • que la procédure mise en œuvre était régulière ;
  • que l’arrêt maladie du salarié postérieur à la rupture conventionnelle était en tant que tel sans incidence sur la validité du consentement du salarié de même que le différend qui a opposé les parties et dont la nature et les termes ne pouvaient caractériser une contrainte exercée sur le consentement du salarié ;
  • que le salarié ne rapportait pas la preuve qui lui incombait des éléments de nature à vicier son consentement.

Secteur d’activité concerné : service public de l’emploi

XII. Prescription

Par un jugement en date du 10 juin 2020, le conseil de prud’hommes de Saint-Denis de la Réunion (départage) a estimé que la demande de rappel de salaire présentée par un salarié était prescrite.

Dans cette affaire, le salarié a saisi le Conseil de prud’hommes pour contester sa classification conventionnelle. Il sollicitait un rappel de salaire afférent aux trois dernières années.

Pour débouter le salarié de sa demande, le Conseil de prud’hommes a considéré que l’action du salarié devait être regardée comme une demande principale de reclassification du salarié qui relevait d’une problématique liée à l'exécution du contrat de travail.

Or, le salarié avait signé, en juillet 2011, un avenant à son contrat de travail mentionnant la classification, selon lui erronée, correspondant à ses nouvelles fonctions et la rémunération attachée.

Le salarié n’alléguant pas que l'exercice effectif de ses fonctions avait évolué depuis la signature de cet avenant, le Conseil de prud’hommes a considéré que le salarié avait connaissance de son classement professionnel et de son niveau de rémunération dès la signature de cet avenant, et que la prescription applicable à l'exécution du contrat de travail avait donc commencé à courir à compter de cette date.

L'action introduite en 2018 par le salarié tendant à obtenir son repositionnement et un rappel des salaires et de congés payés correspondants était donc prescrite.

Secteur d’activité concerné : assurance

XIII. Procédure

a. Procédure d’appel : caducité des déclarations d’appel : série d’arrêts de la cour d’appel de Paris du 18 juin 2020

Dans trois affaires tranchées le 18 juin 2020, le conseiller de la mise en état près la cour d’appel de Paris a jugé que les déclarations d’appel effectuées par les salariés étaient caduques.

La raison de cette caducité : les salariés n’ont pas mentionné, dans le dispositif de leurs conclusions, qu’ils souhaitaient obtenir de la Cour d’appel l’infirmation (totale ou partielle) des jugements attaqués.

Secteur d’activité concerné : télévisuel

b. Nullité de la déclaration au greffe du Tribunal d’instance (élections professionnelles) : jugement du Tribunal judiciaire du 5 mai 2020

Dans une affaire tranchée le 5 mai 2020, concernant un contentieux électoral, le Tribunal d’instance a été saisi à l’initiative de la Confédération nationale du travail (CNT).

Le tribunal judiciaire de Paris, qui a succédé au Tribunal d’instance, a déclaré nulle la déclaration au greffe intervenue par lettre recommandée du 12 septembre 2019, et condamné cette dernière au paiement d’une somme au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Il a retenu pour ce faire, notamment :

  • qu’au jour du dépôt de la déclaration au greffe, la CNT ne justifiait :
    • ni de l’identité des membres de son bureau confédéral, et notamment de celle de son secrétaire ;
    • ni des pouvoirs dévolus à ce secrétaire, et notamment du fait que celui-ci disposait du pouvoir d’ester en justice ;
  • qu’aucune pièce complémentaire ou conclusion n’a été remise au tribunal à l’occasion des audiences, hormis les noms et adresses des salariés élus à convoquer et les conclusions de la Fédération Protection Sociale Travail et Emploi CFDT et des élus ;
  • que ce n’est que lors des conclusions et pièces échangées et déposées à l’occasion des plaidoiries le 6 mars 2020 que la CNT a pu compléter son acte de saisine ;
  • qu’il s’ensuit donc, indépendamment de la question de la régularité de ce pouvoir eu égard aux statuts du syndicat (absence de dispositions statutaires sur la représentation en justice, etc.,) que la CNT n’a fait état d’éléments relatifs au pouvoir de représentation en justice qu’après l’expiration du délai de saisine du tribunal (15 jours), peu importe la date de ces documents, qui de plus n’est pas certaine.

Le Tribunal en a donc conclu dès lors que la déclaration au greffe de la CNT s’est trouvée entachée d’une irrégularité de fond qui n’a pas été régularisée dans le délai de saisine du tribunal. Elle est donc nulle.

Secteur d’activité concerné : service public de l’emploi

c. Rejet d’une demande de communication de pièces (bulletins de paie d’autres salariés) présentée devant le conseiller de la mise en état de la Cour d’appel : ordonnance de la cour d’appel de Paris du 16 janvier 2020

Dans une affaire tranchée le 16 janvier 2020, un salarié a sollicité du conseiller de la mise en état près la cour d’appel de Paris qu’il condamne l’employeur à lui remettre les bulletins de paie d’autres salariés.

Le conseiller de la mise en état l’a débouté de cette demande en retenant les arguments suivants :

  • les éléments dont la production était sollicitée (bulletins de paie de collègues de travail) portant atteinte à la vie personnelle des salariés concernés, il ne pouvait être fait droit à la demande du salarié sans vérification préalable de ce qu’il devait présenter des éléments laissant supposer l’existence de la discrimination syndicale qu’il invoquait – et qui était formellement contestée par l’employeur – et que l’atteinte à la vie personnelle de ses collègues de travail était proportionné au but qu’il poursuivait ;
  • en d’autres termes, la demande du salarié appelant supposait un examen des faits touchant le fond du droit, ce qui excédait les pouvoirs du conseiller de la mise en état et relevait exclusivement de ceux de la Cour d’appel.

Secteur d’activité concerné : service public de l’emploi

d. Séparation des pouvoirs juge judiciaire / juge administratif : jugement du conseil de prud’hommes de Paris du 9 janvier 2020

Au terme d’un jugement qu’il a rendu le 9 janvier 2020, le conseil de prud’hommes de Paris (départage) a jugé :

  • qu’en application du principe de séparation des pouvoirs défini par la loi des 16-24 août 1790, les agents titulaires des services publics administratifs qui ont la qualité d’agents de droit public et qui sont titulaires d’un contrat à caractère administratif, échappent à la compétence du juge judiciaire ;
  • qu’en conséquence, les demandes se rapportant à la relation contractuelle de droit public qui s’est achevée le 31 décembre 2009 ne relèvent pas de la compétence du conseil de prud’hommes ;
  • qu’il en est ainsi également de la demande de dommages et intérêts pour éviction abusive de 1993 à 1999 et de la demande de régularisation de la situation de l’agent auprès des organismes sociaux pour lesquels le demandeur a été renvoyé à mieux se pourvoir.

Secteur d’activité concerné : service public de l’emploi

XIV. Contentieux URSSAF

a. Remboursement de la contribution patronale sur les attributions gratuites d’actions : jugement du tribunal judiciaire de Charleville Mézières du 26 mai 2020

Au terme d’un jugement en date du 26 mai 2020, le tribunal judiciaire de Charleville Mézières a déclaré recevable et non prescrite la demande de remboursement de la contribution patronale spécifique acquittée au titre de l’attribution d’actions gratuites formée par une société auprès de l’URSSAF et condamné ladite URSSAF au remboursement d’une somme de 62 826 euros.

Dans cette affaire, la société avait sollicité, au mois de décembre 2017, le remboursement de la contribution qu’elle avait acquittée en 2011 et 2012 sur des actions gratuites qui n’ont, en définitive, pas été attribuées aux bénéficiaires, les conditions de performance fixées par le plan d’attribution d’actions n’ayant pas été atteintes.

Cette demande s’appuyait sur une décision rendue par le Conseil constitutionnel le 28 avril 2017 aux termes de laquelle la société qui a dû acquitter une contribution lors de la mise en place d’un plan d’attribution d’actions gratuites, peut en obtenir le remboursement lorsque les conditions auxquelles l’attribution des actions était subordonnée ne sont pas satisfaites.

Pour rejeter cette demande de remboursement, l’URSSAF a considéré que la demande de remboursement formée par la société était prescrite puisque formée plus de trois ans après la date de versement de la contribution.

Pour faire droit à la demande de la société et condamner l’URSSAF à rembourser la contribution initialement acquittée par la société, le Tribunal Judiciaire a considéré que le délai de prescription de l’action en remboursement ne pouvait commencer à courir avant la date à laquelle le droit à restitution était né, soit à la date à laquelle il est apparu que les conditions auxquelles était subordonnée l’attribution des actions gratuites n’étaient pas remplies.

Secteur d’activité concerné : industriel

b. Cotisation subsidiaire maladie appelée au titre de la protection universelle maladie (PUMA) : jugement du tribunal judiciaire de Paris du 16 juin 2020

Par un jugement du 16 juin 2020, le tribunal judiciaire de Paris a annulé un appel de cotisations intervenu à l’initiative de l’URSSAF, en date du 15 décembre 2017.

Le litige concernait les conséquences de l’instauration de la protection universelle maladie (PUMA) et de la cotisation subsidiaire maladie (CSM) qui ont remplacé depuis le 1er janvier 2016 la couverture maladie universelle (CMU) de base.

Le 15 décembre 2017, l’URSSAF a adressé à un cotisant un appel de cotisations de la cotisation subsidiaire maladie (CSM) au titre de l’année 2016.

Le Tribunal a annulé cet appel de cotisations sur le fondement et en application de la section I de l’article R 380-4 du Code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n°2017-736 du 3 mai 2017, estimant qu’il appartenait à l’URSSAF, en application de ce texte (considéré d’ordre public et applicable strictement par le Tribunal), d’appeler la cotisation au titre des revenus de l’année 2016 au plus tard le 30 novembre 2017.

Le Tribunal a également rejeté l’argument de l’URSSAF selon lequel cette dernière disposait d’un délai de trois ans pour recouvrer la créance, dès lors que ce délai suppose que la cotisation ait été appelée dans le délai précité.

Secteur d’activité concerné : conseil en sécurité

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