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Loi "industrie verte" et commande publique (3/3) : une meilleure prise en compte de l’en­vi­ron­ne­ment

L’article 29 de la loi décrypté

10/01/2024

L’article 29 de la loi "industrie verte" améliore la prise en compte de l’environnement dans la commande publique, sur plusieurs aspects.

Points-clés

  • Adaptation des critères d’attribution des marchés et des concessions.
  • Aménagement d’une possible entrée en vigueur différenciée des dispositions prévues par la loi Climat et résilience en matière de développement durable. 

Modifications des critères de détermination de l’offre économiquement la plus avantageuse (marchés publics) ou de la meilleure offre au regard de l’avantage économique global (contrats de concession)

Les modifications opérées - Parmi les modifications apportées par l’article 29 de la loi "industrie verte", figure à l’article L.2152-7 du Code de la commande publique, celle ayant pour objet de préciser la définition législative de l’offre économiquement la plus avantageuse en se rapprochant des termes de l’article 67 (critères d’attribution) de la directive 2014/24/UE du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics – que le Code de la commande publique transpose en droit interne. Désormais, cette notion est explicitement définie comme ne limitant pas l’appréciation des offres aux aspects purement financiers.

La première phrase du premier alinéa de l’article L. 2152-7 est ainsi remplacée par deux phrases rédigées comme suit : "Le marché est attribué au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l’offre économiquement la plus avantageuse sur la base du critère du prix ou du coût. L’offre économiquement la plus avantageuse peut également être déterminée sur le fondement d’une pluralité de critères non discriminatoires et liés à l’objet du marché ou à ses conditions d’exécution, parmi lesquels figure le critère du prix ou du coût et un ou plusieurs autres critères comprenant des aspects qualitatifs, environnementaux ou sociaux".

Plus concrètement, dans l’attente de l’entrée en vigueur de l’article 35 de la loi Climat et résilience n° 2021-1104 du 22 août 2021 (fixée au 21 août 2026, en application du décret n° 2022-767 du 2 mai 2022), qui impose dans tous les marchés publics un critère environnemental, l’article L. 2152-7 du Code de la commande publique, disposition de rang législatif, fait désormais référence expressément à la possibilité de définir des critères d’attribution portant sur les aspects qualitatifs, environnementaux et sociaux lors de la détermination de l’offre économiquement la plus avantageuse, là où auparavant cette possibilité figurait uniquement dans la partie réglementaire du code, à l’article R. 2152-7.

De la même façon, la faculté de mobiliser des critères environnementaux, sociaux ou relatifs à l’innovation pour déterminer la meilleure offre au regard de l’avantage économique global dans les procédures de passation de contrats de concession, prévue à l’article R. 3124-4 du Code la commande publique, est désormais inscrite au niveau législatif, par l’insertion de la phrase suivante après la première phrase du premier alinéa de l’article L. 3124-5 : "Parmi ces critères peuvent figurer notamment des critères environnementaux, sociaux ou relatifs à l’innovation".

Qu’est-ce que cela change ? - Outre une conformité plus claire au droit de l’Union européenne, la mesure s’inscrit, selon l’étude d’impact du projet de loi "industrie verte", dans le cadre de la Charte de l’environnement et plus particulièrement de son article 1er, aux termes duquel "Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé", et de son article 6, qui précise que "Les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. À cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l'environnement, le développement économique et le progrès social". Elle satisfait par ailleurs l’exigence constitutionnelle de transposition en droit interne des directives européennes et de l’objectif à valeur constitutionnelle de protection de l’environnement consacré par le Conseil constitutionnel (décision n° 2019-823 QPC en date du 31 janvier 2020).

Ce n’est cependant pas la position exprimée par le Conseil d’Etat dans son avis sur le projet de loi, qui recommandait au Gouvernement de ne pas maintenir cette disposition, estimant que "l’explicitation de cette notion d’offre économiquement la plus avantageuse a été inscrite jusqu’à présent dans la partie réglementaire du Code de la commande publique et [qu’]aucune raison valable ne conduit à revenir sur le partage entre loi et règlement auquel il a ainsi été procédé". En   outre, selon la Haute juridiction, la disposition modifiée ayant vocation à disparaître à l’entrée en vigueur de celle résultant de la loi "climat et résilience", soit au plus tard le 21 août 2026, "un tel enchaînement de textes, dans un temps aussi court, n’est pas de bonne méthode législative et est inutilement complexe".

L’étude d’impact souligne que la mesure est par ailleurs destinée à inciter les acheteurs à prendre en compte les incidences environnementales tout au long de la vie de la prestation, à savoir aux différents stades de l’extraction des matières premières énergétiques et non énergétiques nécessaires à la fabrication, de la production, de la commercialisation et de ses conditions, du transport, de l’utilisation et de la maintenance, du réemploi, de la réutilisation, du recyclage, de la valorisation, de la collecte et de l’élimination vers les filières de fin de vie.
 

Alignement pour les marchés publics de la possibilité d’une entrée en vigueur différenciée des dispositions en matière de développement durable sur le mécanisme déjà prévu pour les contrats de concession

L’article 29 de la loi "industrie verte" modifie le calendrier d’entrée en vigueur de certaines dispositions de la loi "climat et résilience" relatives à la mise en œuvre des obligations en matière d’application des critères d’attribution, de spécifications techniques et de conditions d’exécution prenant en compte les caractéristiques ou les considérations – notamment – environnementales dans les marchés publics (article 35, II, 1° et 3° à 12°).

Le principe d’origine - Dans la version initiale de la loi "climat et résilience", le IV de l’article 35 prévoyait que les dispositions susvisées entreraient en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard cinq ans après la promulgation de ladite loi (tandis que le 2° de l’article 35, II, devait entrer en vigueur le 1er janvier 2023).

La modification opérée - L’article 29 de la loi "industrie et verte" prévoit désormais que les dispositions des 1° et 3° à 12° du II de l’article 35 de la loi "climat et résilience" entreront en vigueur à des dates fixées par décret en fonction de l’objet du marché, et au plus tard cinq ans après la promulgation de cette loi.

Pour les marchés portant sur l’implantation ou sur l’exploitation d’installations de production ou de stockage d’énergies renouvelables, au sens des dispositions de l’article L. 211-2 du Code de l’énergie, les 1° et 3° à 12° du II s’appliqueront à compter du 1er juillet 2024. Par parallélisme, l’exception tenant à une entrée en vigueur fixe au 1er juillet 2024 pour les contrats afférents à l’implantation ou à l’exploitation d’installations de production ou de stockage d’énergies renouvelables est également introduite, au V de l’article 35.

Qu’est-ce que cela change ? - Les changements introduits par la loi "industrie verte" ouvrent la faculté de différencier l’entrée en vigueur des dispositions des 1° et 3° à 12° de l’article 35, II de la loi "climat et résilience" en fonction des secteurs concernés par le marché public considéré, à l’instar de ce qui était déjà prévu au V de l’article 35 pour les dispositions de ce même article en matière de développement durable pour les contrats de concession (entrée en vigueur à une date fixée par décret "en fonction des catégories de concession"). Cela devrait permettre, selon l’étude d’impact du projet de loi "industrie verte", une entrée en vigueur anticipée, tenant compte du degré de maturité des secteurs économiques et, ainsi, une mise en œuvre optimale des nouvelles obligations en matière d’achat public durable.


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